lundi 31 décembre 2012

Les dix événements hallucinants (et mémorables) de l’année 2012 !


(Photos choisies parmi celles offertes par Google Images)

1.
Le 4 septembre, un monsieur décide de s’en prendre, sans raison aucune, à la malheureuse porte arrière du Métropolis, porte que, pour d’obscures raisons, il estime dangereuse pour les Anglais. Le monsieur a l’arme et le feu à la main. Un technicien de scène meurt, un autre est lourdement blessé. Par un incroyable hasard, Madame Pauline Marois se trouve sur place, sur la scène même du Métropolis, tout près de la porte maudite et anathémisée. (L’infâme PQ est capable de tout, même d’un hasard aussi perfide. À TLMEP, Mme Marois en prétendra de bien bonnes, sur cette «affaire».) Quant au monsieur qui n’aime pas les portes arrière, il se lance dans une carrière de journaliste expert, et commente avec succès, et en direct s’il vous plait, la formation du nouveau gouvernement. 

2. 
Le Journal de Québec découvre qu’un vrai pauvre est membre du Cabinet de l’infâme PQ, et dévoile le scandale à son lectorat ahuri. Le pauvre ne payait pas toujours son loyer à temps, et avait quelques créances (sans compter son immense crédibilité, évidemment sans importance dans l'affaire.) Le pauvre aurait bu du vin. Le pauvre aurait même magouillé avec l’assurance-emploi, pour éviter de crever de faim. Mme Françoise David, que d’aucuns surnomment la Madone de Gouin, aime certes les pauvres, mais de loin, et surtout pas au Salon de la Race. Elle demande donc au pauvre en question de réfléchir à un avenir qu’il n’a plus. Dépité, le pauvre démissionne, et s’excuse d’avoir été pauvre. De toute l’«affaire du pauvre Breton», c’est le socialisme à la québécoise qui en sort moralement grandi, et qui a désormais de l’avenir.

3. 
Monsieur Gabriel Nadeau-Dubois, séduisant jeune homme, mais pauvre lui aussi, n’a pas pu, tout comme le pauvre mentionné dans la précédente rubrique, payer un loyer mensuel écrasant, dont les termes revenaient affreusement vite. Tombée sous le charme irrésistible du jeune homme, comme l’était du reste tout le Québec - hormis le proprio de GND, Mme Françoise David, qui aime bien les pauvres quand ils sont propres de leur personne, et si mignons qu’ils donnent envie d’être charitables, a invité M. Nadeau-Dubois à joindre les rangs de Québec Solidaire, pour contrebalancer l’autre, là, à la beauté fade et régionale, qui a rejoint les rangs de l’infâme PQ. 

4. 
En promettant de n’être ni de gauche ni de droite, ni fédéraliste ni souverainiste, ni libéral ni péquiste, ni obèse ni maigrichon, en fait de n’être ni pour ni contre bien au contraire, M. François Legault renouvelle en profondeur la pensée politique au Québec; pour parachever le travail, il s’inspire d’études secrètes qu’il lit seul, en toute discrétion, et s’adjoint, sans rien lui en expliquer, Monsieur Gérard Deltell, qui, lui, se charge de dénoncer les manigances secrètes de l’infâme PQ. Malgré cet effort intellectuel exceptionnel, les Québécois restent insensibles aux charmes du bon Dr Pillsbury - mais c’est dans l’enthousiasme qu’ils élisent La Source, qui sait tout, et peine à retenir le moindre secret.

5. 
Le projet d’indépendance du Québec fait d’incontestables progrès, puisqu’il y a trois partis politiques, désormais, pour en faire la promotion. L’infâme PQ est souverainiste-si-possible-quand-ça-conviendra-un-jour-peut-être-faut-pas-virer-fou-ça-va-être-difficile; Option Nationale est indépendantiste-sans-gouvernance-souverainiste-et-sans-obsession-référendaire-juste-un-vote-ça-suffit-amplement-d’ailleurs-je-suis-le-meilleur; Québec Solidaire est souverainiste-puisque-la-gauche-l’est-majoritairement-mais-non-exclusivement-de-sorte-que-ça-pourrait-changer-à-preuve-on-a-crissé-dehors-Gilles-Duceppe. Pas de doute possible, l’indépendance, c’est pour demain. Il ne faut pas cesser pour autant de dénoncer l’infâme PQ qui entrave l’exercice démocratique, et paralyse la liberté du vote, en obligeant, bouncers à l’appui, les souverainistes terrifiés à voter pour lui.

6. 
Ce n’était pas une erreur de Bernard Derome, ni un défaut de rigueur dont TVA et sa Poule (aux oeufs d’or) ont toujours fait preuve à chaque bulletin de nouvelles; non, non, c’était bien vrai cette fois-ci: Monsieur Jean Charest a été battu dans sa circonscription électorale de Sherbrooke ! Seul élément déplorable dans l’affaire: c’est un infâme péquiste, pire encore un ancien bloquiste, qui l’a défait. La population de Sherbrooke a (de toute évidence) été trompée, illusionnée. On voit ce que donne l’absence de réforme du mode de scrutin: un scrutin vieillot, un vieux péquiste, c’est clair comme un vieux gin.

7. 
Le NPD est resté silencieux durant toute la crise pré-révolutionnaire du printemps érable. À celles et ceux qui s’étonnaient de la chose, on leur répondait ce que tout indépendantiste devrait savoir et respecter comme étant l’idéal constitutionnel allant de soi: il y a un partage des pouvoirs dans ce pays, (le Canada), et le NPD ne faisait qu’honorer la rigidité de ce partage des attributions. Voilà enfin l’expression d’une authentique observance des compétences constitutionnelles partielles et limitées du Québec: voilà enfin ce qu’est pour de vrai l’indépendance du Québec. Finie, la confusion ! L’indépendance des pouvoirs provinciaux, sans se séparer ! Il n’y a bien que l’infâme PQ pour ne rien comprendre à cette logique fondamentale. 

8. 
M. Stephen Harper rénove le Canada de fond en comble, d’une mer verdâtre à l’autre: la monarchie est ainsi redorée, l’armée est gratifiée d’armes flambant neuves, et tant qu’à faire, la population canadienne l’est aussi, (fini le registre des armes à feu, et Justin Trudeau est bien d’accord, faut ce qu’il faut quand on parle de culture canadienne), l’ONU est eunuquisée, Israël est sauvegardé, les réfugiés sont pourchassés, Kyoto est déchiré, (y’a pas de pauvre dans le gouvernement du Canada !), la torture est réhabilitée, et bientôt la sainte Inquisition sera de nouveau pratiquée, l’Église restant le meilleur moyen, comme chacun sait, pour lutter contre la pédophilie et autres perversions. Pendant ce temps, au Québec, on oublie ces détails infimes, que seuls des esprits tordus peuvent trouver lourds de conséquence, et on se concentre sur le vrai combat, la lutte contre l’infâme PQ. 

9. 
Jamais l’égalité entre les hommes et les femmes n’a été illustrée avec autant de justesse et de précision qu’en cette année 2012, où l’on a pu voir la désormais célèbre matricule 728 prouver, hors de tout doute raisonnable, qu’une faible femme, comme l’écrivait naguère Simone de Beauvoir, n’est que le produit de son éducation ratatinée: si l’éducation change, si le cou se redresse et le manche se relève, la femme change si irréversiblement, que c’en est colossal; à formation égale, une femme peut avoir les muscles d’un homme, sa cervelle, sa culture, son efficacité, son langage même. C’est un désastre. 2012 aura prouvé que le discours féministe, longtemps angélique, qui rêvait d’un monde de justice et de paix gouverné par des femmes, se trompait tragiquement: une femme éduquée en toute égalité, ça «varge»* comme un homme, ça délire comme un homme, ça guerroie comme un homme. Napoléone est née, Hitlérina prendra bientôt la relève. Écrasons l’infâme (PQ) !

10. 
Mado Lamothe est dans la courte liste des personnalités de l’année du journal le plus neutre et le plus objectif qui soit, The Gazette bien sûr. (On feint, ici, d’ignorer l’hebdomadaire Voir. J’y ai des amis FB !) Un choix qui ne peut que plaire, dans certains milieux conservateurs, Mado s’étant plusieurs fois proclamée reine de Montréal. Un pas de plus, et elle se couronnera elle-même, sous les voutes de Notre-Dame, là même où Céline s’est jadis mariée au Prince en personne. Mado se retrouve dans la même courte liste que Justin Trudeau - autre clown emblématique de Montréal. Qui ne dit mot consent, j’imagine, et Mado n’a pas protesté, bien au contraire: loin d’en être malade, on l’a plutôt vue, sur Facebook, s’en réjouir ! C’est fou, ce que ça rapporte, être reine, à Montréal. À elle seule, ou presque, Mado corrige les conséquences économiques désastreuses qui suivent, fatalement, l’élection de l’infâme PQ. Vive Mado ! Vive la reine ! Vive Lise Thibault ! Vive le cognac à gogo !

Oh, et à propos, ne vous en faites pas pour 2013: Madame Marois a compris, allez !


* Pour le bénéfice de mes lecteurs français, «varger» signifie frapper, mais avec plaisir et jouissance. Jadis un privilège masculin, varger à coups redoublés est désormais un délice partagé 50/50. La justice, il n’y a que ça de vrai.



mercredi 7 novembre 2012

OBAMA, OU L'ESPOIR PAS MORT




Je rentrais ce soir, à pied, d’un copain, où j'avais regardé l'élection américaine à la télé, sur CNN ; remontant la rue Amherst, j'ai vu ceci, tout juste installé par les cols bleus de la ville: normalement, je déteste ça, ces fausses dorures, ces rues qui scintillent comme des églises (ou des casinos) dédiées aux gens très pauvres, comme des musées consacrés à la culture des objets pop. Mais là, même si ces décorations ne sont que du toc, je trouvais ça beau. C'était romantique à souhait que de voir cette lumière percer et colorer le vif de la nuit. Immédiatement après, rentrant chez moi, j'ai écouté le discours du président Obama, tout juste réélu: magnifique, superbe, reprenant parfois, presque mot pour mot, les paroles les plus audacieuses de son allocution de novembre 2008, parlant de tous et de toutes, de la somme des différences qui font la nation américaine. Il a parlé d’égalité des chances, de compassion, de tolérance, des minorités diverses, des gays. Il a oublié (volontairement ?) les athées, je crois : il les avait mentionnés eux aussi, il y a 4 ans. Il m’a vraiment emballé. J’y ai cru. Il m'arrive encore, comme à tout le monde, je suppose, d'espérer un monde meilleur, sans hommes de paille, et sans pacotille.






samedi 3 novembre 2012

LA GUERRE, LA PAIX ET L'ÉLÉGANCE DE COEUR


Photo: Jacques Boissinot, Presse canadienne



Je viens tout juste d'écouter les nouvelles du jour, à 23 heures, au Réseau de l'information en continu... De vieux soldats canadiens s'offusquent — spontanément ? On peut au moins en douter. « Elle a insulté les vétérans ! » Elle, c'est Mme Pauline Marois, première ministre du Québec, indépendantiste; elle a osé porter le coquelicot, l'emblème du Souvenir, rattaché à sa veste par une épingle en forme de fleur de lys.  Une fleur de lys ! L'emblème du Québec ! Et tout de même une image très apparentée à la France éternelle, avec laquelle nous nous sommes battus, non, en 14, en 40 ?... Elle, elle donne pourtant une explication toute simple à son geste; et pour apaiser l'absurde tempête dans un verre d'eau, si proche de s'exciter, dans cette maison de fous*, toujours, quand la chicane vire au sordide, et si dangereusement susceptible d'alimenter tous les fanatismes, elle s'est empressée de faire savoir qu'elle porterait le coquelicot comme le veut la coutume et le règlement de l'insigne. Honte à tous ceux et celles qui ont fait un plat de l'affaire, caricaturant Mme Marois aux extrêmes.  Honte en particulier à Gérard Deltell, le pire de tous, l'imbécile de première, qui en a remis une couche épaisse, faisant de Mme Marois une provocatrice volontariste, particulièrement perverse. Et pourtant, Mme Marois a essayé de calmer le jeu, parce que faire autrement n'en valait pas la peine, sauf d'être porteur de hauts risques ultras. Pourrait-on, si possible, se souvenir qu'il y a à peine deux mois, cette femme a été victime d'une tentative d'assassinat fomenté par la haine ?

* L'expression est de M. René Lévesque, telle quelle, dans Option Québec.







jeudi 11 octobre 2012

À PROPOS DU MATRICULE 728



(Youtube: images de Radio-Canada )



Les quelques lecteurs que j'ai, en francophonie, ne comprendront rien à la richesse des dialogues contenus dans cette vidéo, s'ils leur prenaient l'envie de la regarder. (Elle vaut le coup, c'est le cas de le dire !) Mais ils en saisiront sûrement tout le précieux sens, à simplement jeter un œil sur le déroulement, parfaitement sidérant, de l'action. L'assaut, cette fois-ci, n'est pas au Métropolis, comme au 4 septembre dernier — j'ai parlé de cet incident tragique, ici, sur ce blogue. Non, pour cette fois, les hostilités se déroulent rue Papineau, à Montréal, dans un emplacement où on ne fait que de la musique, entre gars, rien de terriblement délinquant. Pas de révolte générale en vue. Mais une (seule !) bouteille de bière trop visible de la rue, une policière qui a sauté une coche, et le spectacle a eu lieu, sans autre musique de fond que des cris terrifiés et des insultes grossières.  

Voyez-vous, au contraire de l'ancien ministre des Finances du Québec, M. Raymond Bachand, ça ne me dérange pas que le nouveau gouvernement du Québec «divise» la société par ses politiques de centre-gauche, parce qu'elle l'est fatalement, « divisée », la société, dès qu'il y a inégalité économique; elle l'est fatalement, dès qu'il y a enrichissement de quelques-uns par le moyen du travail, des impôts et de l'exploitation salariale du plus grand nombre. La société est inégale, elle est partagée. C'est la richesse qui ne l'est pas. L'inégalité «est». C'est comme ça. 

J'aime nettement moins, cependant, la haine que les tensions sociales génèrent, et que, de toute évidence, on attise dans certains milieux. La haine n'est jamais noble, la haine n'est jamais justifiée. La violence de l'agente 728 est haineuse et n'est pas, en aucun cas, un fait isolé, une dérive particulière. La policière hait les artistes, les carrés rouges, « toute cette marde-là » — entendons les étudiants, les agitateurs de casseroles, les manifestants, les contestataires et quant à faire, Mme Marois, actuelle Première ministre, Mme David, chef du parti de gauche Québec-Solidaire, les profs de cégep, les profs de l'UQAM, les centaines de milliers de personnes qui ont pris la rue le printemps dernier... Il faudrait être extraordinairement naïf pour penser que cette haine qui tourmente la gardienne de la paix, on ne le lui ait pas inculquée, quoi qu'il en soit de la personnalité fiévreuse de Stéphanie Trudeau. On la lui a apprise, et c'est affreusement troublant de le penser, parce que ça justifie les accusations souvent répétées, durant la crise sociale du printemps 2012, de politisation des forces policières. La violence de l'agente Trudeau est « politique » et sociale. Elle trouve une oreille attentive quand elle raconte son intervention, et profère ses insultes. Et elle sait parfaitement bien qui est l'ennemi. (On aurait presque envie de dire: l'ennemi de classe.) On le lui a décrit, nommé, ciblé, c'est évident.

En ces temps où un gouvernement de « gauche » nouvellement élu a échoué à faire adopter des mesures fiscales progressistes, parce que l'opposition (néo-libérale) s'est déchaînée, sans retenir la haine de ses attaques, la violence policière, bras armé des notables et des puissants (j'entends: des détenteurs de capitaux), devient très réellement inquiétante. Le ministre de la Sécurité publique devrait peut-être y regarder d'un peu plus près.




lundi 24 septembre 2012

L'IMPÔT ? C'EST DU VOL !


( Source: Cyberpresse. 23 septembre 2012 )



La hausse d'impôts du PQ (pas du gouvernement, non, du PQ) condamnée: c'est le titre d'un article de la Presse, signé Philippe Teisceira-Lessard. Un jeune homme. La relève intellectuelle de la droite. Un chantre, parmi d'autres, d'un profil social à la Mitt Romney, où la richesse sert la multitude et la fait travailler. 

Et elle est condamnée par qui, cette spoliation fiscale ? Une incommensurable foule en colère ? Une gigantesque manifestation de casseroles agitées ? Une prise révolutionnaire du Black Watch par une multitude vociférant: « Aux armes, citoyens ! » ? Non: la hausse d'impôts est condamnée par la Coalition Avenir Québec et le Conseil du patronat. Oh ! Oh... Voilà donc la source unanime de la révolte de masse contre l'horrible PQ. Respect. Ce qu'on lira dans l'article, c'est la science économique en action, c'est le souci économique de ceux qui savent, et qui, comme de juste, n'ont pas d'intérêts particuliers. 

Ce qu'il faut savoir, c'est que cette hausse des impôts, qui affectera celles et ceux qui touchent plus de 130,000 dollars par année, est d'un tel « manque de respect » qu'elle en est « inacceptable », surtout quand on sait que les Québécois sont les plus taxés en Amérique du Nord: un scandale, Madame, oui, un scandale qui empêche les plus fortunés de « planifier leur budget » (de planifier leur budget ! c'est écrit tel quel ! la blague — inconsciente ? cynique ? — est bonne ! ) Et attention, que l'article nous dit, si nous ne sommes pas gentils avec les gens qui gagnent, quoi, 300,000, 400,000 dollars par année, ils pourraient bien s’envoler, aller là où ils pourraient bénéficier d'une fiscalité tellement plus compréhensive avec la fortune: quelque chose comme le syndrome belge qui frappe la France ces jours-ci, et qu'on importe allègrement, c'est gratuit. Mme Lise Payette disait des gens d'affaires qu'ils n'ont pas d'âme, pas de patrie. On se prend à nouveau à la croire: elle dénonçait pourtant la chose il y a déjà plus de 30 ans.

C'est là (je n'ai rien soustrait à l'article) tout l'essentiel de la condamnation généralisée dont la Presse se délecte les babines, et pense en alerter l'opinion. On a eu le printemps érable. On aura l'automne rouge feu: des masses humaines hurlant leur colère, dirigée contre la première ministre Marois. Paul Desmarais marchera en tête, arborant la feuille d'érable érubescente comme une cocarde ! Ce qu'ils rigoleront, quand même, quand ils se rappelleront la blague, le 25 décembre prochain au soir, nostalgiques des Noëls anciens où les pauvres étaient de vrais pauvres, éléments magiques — et comme tels cruciaux  — de la Nuit où le privilégié se rachetait l'humanité à si bon compte...

PS ( en date du 7 octobre 2012 ):
«Behind the pretenses to egalitarianism that dress up confiscatory Quebec tax laws and repressive language laws, the real driving ambition has been to push the non-French out of Quebec, buy up the real assets they cannot physically take with them, especially their mansions and office buildings in Montreal, and eliminate up to half the emphatically federalist votes in the province.» Conrad Black, The National Posthttp://www.nationalpost.com/m/wp/full-comment/blog.html?b=fullcomment.nationalpost.com%2F2012%2F10%2F06%2Fconrad-black-as-quebec-decays-toronto-seizes-greatness





mercredi 5 septembre 2012

LE COURAGE NE SE CONTREFAIT PAS...





Vers 23 h, en regardant la soirée électorale québécoise à la télé, chez un ami, je me disais que Mme Pauline Marois avait gagné le titre (et la fonction) de première ministre du Québec de haute lutte, certes, mais pourtant de justesse, presque en accroc à un processus électoral qui pourrait être exemplaire. Ça ne me donnait pas du tout le goût de célébrer. Le résultat des élections était drôlement serré, complexe : le gouvernement que Mme Marois allait désormais diriger n’aurait qu’un bien faible mandat de gouverner, encore moins de libérer quoi que ce soit. Mais elle, quand elle s'est présentée à la foule de ses partisans, elle était sereine, souriante, visiblement consciente de la lourde responsabilité d’État qui était désormais la sienne; elle a livré un discours tout en douceur, tentant de calmer une foule malgré tout déçue, et un peu amère. Quel souverainiste ne l’aurait pas été, même de la belle victoire de Françoise David, vécue ce mardi soir, plus que jamais, comme une douloureuse déchirure ? Je la trouvais belle, Mme Marois, digne, apaisante, et courageuse, d’exprimer encore et malgré tout ses espoirs et ses convictions. Elle a rappelé l’ouverture nécessaire sur le monde. Elle a tendu la main aux peuples indiens, leur a offert le dialogue, l’égalité entre nations. Elle a assuré, à nos compatriotes anglophones («entendez-moi bien», a-t-elle insisté) que jamais aucun de leurs droits, inaliénables, ne serait restreint.

Et puis, là, immédiatement, le drame, terrible, en direct, à la télé. Une tentative d’assassinat, sur la personne de la première ministre élue, visant peut-être aussi plusieurs autres militants indépendantistes. Deux personnes sont gravement blessées, une en est morte. Morte. Ce drame, c’est l’acte d’un probable dément, isolé, qui s’est investi lui-même d’une mission, qui s’est autoproclamé le vengeur d’une communauté qui se dit, depuis trente ans, depuis quarante ans, persécutée dans sa richesse, bafouée dans ses droits. « Les Anglais se réveillent ! », clamait le forcené, pour qu’on l’entende, de loin, et qu’on sache, tous, que son crime avait un sens. Le choc a été considérable. L’animateur télé, bouleversé, ne regardait plus que dans le vide, tout en essayant de comprendre l’impossible et l’impensable. Mme Pauline Marois, première ministre élue du Québec, venait d’échapper de peu à un attentat motivé par la haine.  Au Québec. Dans un pays où l’immense majorité de la population, depuis toujours, est pacifique jusqu’à l’aliénation.

Et puis, là, tout de suite après l’horreur, c'est l’étonnement, c'est la stupéfaction : Mme Marois est restée présente parmi les siens, n’a rien perdu de son assurance, ni même de sa bonhommie. Elle a tenu à rassurer la foule, à compléter la fête de la victoire, si faible et presque pauvre. Ce qu’elle savait à ce moment-là, de la tragédie, qui n’avait que quelques minutes, n’est pas ce qui est ici important : ce qui l’est, en revanche, c’est qu’après avoir tenu un discours vibrant, chaleureux, et rassembleur, elle soit revenue sur scène, affrontant un danger toujours possible, et surmontant sa propre peur, sans que rien n’y paraisse. Magnifique. Elle était tout à la fois superbe, féminine, décidée, leader vraiment responsable, dans un moment où le Québec tout entier a ressenti le besoin d’être rassuré. Jamais je n’ai cru les propos d’amour de Mme Marois aussi sincères que ce soir, au cœur d’événements violents, qui la visaient elle, elle et ses convictions. Mme Marois, ce soir, cette nuit, a gagné vraiment ses élections. Elle s’est méritée la fonction de première ministre du Québec, solide, béton, admirablement courageuse, dotée d’un jugement impeccable en situation de crise. S’il fallait encore en convaincre nos compatriotes, je fais le pari que c’est maintenant chose faite. Mme Marois a été tragiquement investie, mais nous tous, attachés à la démocratie et au bon sens, nous l’adopterons et la protégerons.

Il y a les excessifs (que je connais, parfois) qui polluent les réseaux sociaux de leur mépris et de la virulence de leurs propos (et qui le font encore cette nuit) ; il y a les enragés complètement fanatisés, qui distillent leur haine viscérale d’un Québec français qui s’affirme pourtant si difficilement, gêné parfois de sa timide audace, et qui par de trop courts instants rêve d’un pays à lui, un pays libre et indépendant, le meilleur professeur qui soit pour apprendre la fierté d’être et la capacité de réussir. Ces imbéciles, excessifs, enragés, qui sont toujours de trop, dans toute société, dans tous pays, portent leur part de responsabilité dans l’événement tragique de ce soir. Le crime est l’action d’un fou, c’est évident. Un désaxé, un pauvre type. Mais la folie ne se nourrit jamais d’elle-même et d’elle seule : elle est sociale, elle est alimentée. Ce soir, cette nuit, j’ai honte pour celles et ceux qui, par leur hargne, leur mépris, leur racisme même, ont engraissé le délire paranoïaque d’un halluciné.


PS (2 octobre 2012)

Il y avait, ce soir, au Métropolis, un spectacle-bénéfice: les critiques parlent déjà d'un événement digne, grave, musicalement réussi. Bravo pour qui a songé à ce concert, bravo aux artistes qui ont participé à l'événement. Il y a eu un mort, le 4 septembre dernier. Il y a eu un blessé grave. Tant mieux qu'on ne les oublie pas, tant mieux qu'on aide les victimes initiales de cette tragédie. Mais je ne voudrais pas qu'on oublie, jamais, ou qu'on ignore, ou qu'on fasse silence sur le fait qu'il y avait une personne qui était spectaculairement visée, au soir du 4 septembre, qui survit, qui assume le poids tragique de cet événement. Je n'ai pas d'intention politique, en écrivant cela, si ce n'est que je ne souhaite pas que, pour des raisons qui seraient précisément politiques, on fasse comme si cette personne visée n'existait pas.





lundi 3 septembre 2012

WEEK-END À QUÉBEC-LA-MAGNIFIQUE




Week-end à Québec-la-magnifique. Ciel peint bleu (comme disait l'autre) sur une ville d'une exceptionnelle beauté. Il y avait foule, samedi soir, pour Madonna: on s'est approché de la scène, et on a entendu, de loin, la diva... Le même soir, nous nous sommes plutôt, de préférence, rendus au Moulin à images, création de Robert Lepage, spectacle en trois dimensions diffusé sur les silos à grain du Vieux-Port: c'était à ce point étonnant, superbe, inspiré, que je m'imaginais, rien de moins, serrer dans mes bras le créateur lui-même, et le convaincre de son talent ! Il y avait, à Québec, des grappes de touristes émerveillés: à ce point photographiée, la ville pourrait en venir à perdre son âme, éparpillée aux quatre coins de la planète. Mais non: elle reste ce qu'elle est, l'autre Amérique, l'authentiquement française, avec le goût et le savoir-vivre de la vieille France. (Dommage qu'elle ne sache pas encore comment voter!) C'est le mystère de Québec, ce qu'elle a de moins charmant, cette ville restée française, mais pourtant plus colonisée que le reste du Québec tout entier: un jour, peut-être, cela changera. En attendant, la ville s'illusionne, se dit sans gêne Capitale nationale, et pour elle l'affaire est faite; elle se couvre de monuments d'illustres personnages, ou réputés comme tels. Les guides touristiques en remettent, disent n'importe quoi aux étrangers qui ne retiendront rien, de toute façon, de la leçon d'histoire absolument nulle qu'ils subissent sourire ébahi... (Rien d'aussi grave, quand même, que ce guide français qui prétendait naguère, à Fontainebleau, que saint Louis y était mort !) Quant à la Fête Arc-En-Ciel qui avait lieu ce we, la Gay Pride de Québec, elle a encore à se payer d'un peu d'audace pour avoir vraiment l'air d'être fière valant peine...

Merveilleuse ville ! Elle est ce qu'on a de plus beau, très probablement, dans ce pays du Québec qui se rêve à n'en plus finir, et qui ne peut pourtant pas compter sur Québec pour se réveiller et aboutir, une fois pour toutes, et qu'on n'en parle plus...








lundi 20 août 2012

GAY PRIDE À MONTRÉAL




C'était, à Montréal, le week-end de la Fierté — ailleurs appelée Gay Pride. Beaucoup de participants pour la journée communautaire de samedi, de partout, de toutes tendances. Le défilé du dimanche était emblématique de ce qu'il est partout au monde (où on le tolère), coloré, extravagant, politisé pour la cause, donnant beaucoup dans l'autodérision — ce que j'adore. Un public bon enfant, drôle, toujours souriant. Très chaleureux avec Québec solidaire tout comme avec le Parti québécois. De longs, de gros applaudissements pour l'importante délégation d'étudiants portant le carré rouge, et qui s'est mêlée, à ma grande surprise, à la parade. Une foule de spectateurs immense, telle que je n'en avais pas vues ces dernières années, plébiscitant toutes les variétés de l'espèce humaine, le temps d'une trêve de quelques heures. Une foule feignant d'oublier à quel point la fête est commercialisée, récupérée, rattrapée par le néolibéralisme qui a voulu de l'argent rose, et qui, tout bien réfléchi, nous veut  bien dans son armée: sur les lignes de front, les saunas sont plutôt rares...  Le week-end de la Fierté reste un beau moment, nécessaire à un apprentissage de la tolérance, qui n'est pas encore fini: la résistance est redoutable, dès qu'il s'agit de sexualité, et plus encore d'identité sexuelle. Il faut veiller, et ce sera là peut-être notre dernier combat, à ne pas devenir un instrument manipulé, crédule jusqu'à la bêtise, et  totalement inconscient, de l'impérialisme américain, et de celui, ethno-culturel, de l'Occident. 






jeudi 16 août 2012

LA GRANDE IMBÉCILLITÉ


Cyberpresse, 16 août 2012. 



Cyberpresse, 21 heures : 43 % des personnes qui se sont exprimées, par le biais d'une question sondage frisant le racisme, et réveillant les pires préjugés qui soient, se sont dites d’accord avec les propos du maire de Saguenay, Jean Tremblay. Je suis stupéfait, honteux : 7402 de mes compatriotes pensent que les personnes nées hors Québec, mais devenues citoyennes de ce pays, amoureuses de ce pays, tout aussi bien et tout autant que tous les autres citoyens du Québec, au restant parfaitement intégrées, au point d’adhérer au parti politique qui prône l’indépendance nationale, le français comme langue commune et la laïcité pleine et entière de l’État, que cesdites personnes n’ont pas le droit d’exprimer une opinion quant à un projet de société qui n’est pas traditionnel, et qu’elles devraient s’exclure d’elles-mêmes du débat public.

7402 de mes compatriotes pensent, comme le maire Tremblay, que, «nous les mous, les Canadiens français, on va se faire dicter comment se comporter, comment respecter notre culture par une personne qui arrive d'Algérie… On n'est même pas capable de prononcer son nom… Je n'aime pas que ces gens-là (les immigrants) arrivent ici puis établissent leurs règles… Ils vont faire disparaître la religion et notre culture de partout.» Le maire a déliré ; il a pris la défense du catholicisme par un appel à peine déguisé à la haine et à l’exclusion, et c’est ce qui reste, dans l’espace public, l’exclusion, la haine, sans ouverture à l’autre et à l’échange de vues. N’importe quel peuple sur Terre, et le nôtre aussi, bien entendu, peut s’expliquer avec ses nouveaux arrivants, insister sur les valeurs fondamentales qui sont les siennes. C’est ce que propose de faire la Charte de la laïcité. Mais rendons-nous bien compte que nombre des 7402 électeurs québécois qui, aujourd’hui, ce soir, appuient les inepties du maire Tremblay ne veulent pas promouvoir des principes essentiels; ils dénoncent qu’une candidate issue de l’immigration ait des principes essentiels, ils martèlent un racisme enfin libéré, un rejet de l’immigration en tant que telle, contents de pouvoir enfin soulager la peur de l’autre qui peut tous nous habiter, et qui fait d’affreux ravages quand on n’y prend pas garde. Ce qu’a dit le maire, c’est petit, c’est médiocre, c’est en fait scandaleux. Quant au sondage de la Cyberpresse, il n’a bien sûr rien de scientifique. Mais j'aimerais quand même, ce soir, habiter Trois-Rivières, et pouvoir contribuer, par mon vote, à donner à la candidate péquiste d’origine algérienne une victoire telle que les connards sectaires, crédules, intolérants, s’écrasent à tout jamais. Je rêve, mais j'espère quand même.

Ce n’est pas d’hier que dès qu'on «touche» au crucifix, au Québec, on mobilise une droite réactionnaire qui, souvent, ne pratique plus aucune religion, mais qui, hurlant et criant au sacrilège, préserve l’orthodoxie sociale et  trouve par là un moyen parfaitement cynique de canaliser les sentiments populaciers les plus immondes, à ras de terre. C'est la même droite qui applaudissait Camil Samson, lui qui déplorait qu'on sorte le crucifix des écoles. C'est la même droite qui a manifesté contre les Fées ont soif, devant le TNM, en 1979, et qui s'est prolongée dans le mouvement des Yvettes, lors du référendum de 1980. C’est le même conservatisme social, braqué depuis longtemps contre la révolution sexuelle et la révolution féministe, qui persuadait la même droite de refuser (criminellement) les pubs de santé publique exhortant de toute urgence à utiliser des condoms lors de rapports sexuels, à l'époque où Mme Thérèse Lavoie-Roux, ancienne commissaire d’école catholique, était ministre de la Santé. Ce sont les tenants de la même droite qui animent les radios poubelle, qui cultivent le maire et les gens qui pensent comme lui.

Il y a aussi, dans cette affaire du crucifix, et c’est ce qui gêne le plus, de la xénophobie, et du racisme, qui s'enracinent parfois dans la simple ignorance des autres (c'est très certainement le cas du maire Tremblay, qui, ne sachant prononcer le nom de Mme Benhabib, avoue du même coup qu'il ne l'a jamais lue). Voilà que ce soir, un ministre libéral du coin, je veux dire du Saguenay, soutient le maire, applaudit, c’est lui qui le dit, à des positions courageuses. Il y a certainement (à n'en pas douter) de la partisanerie politique dans les réponses au sondage de la Cyberpresse, qui saute sur l'occasion pour déstabiliser le Parti québécois et promouvoir d'autres partis semblant mieux «sauver» le Québec traditionnel contre les «immigrés». L'ADQ avait joué cette carte, à fond, aux élections partielles et générales de 2008. On peut imaginer que bien des personnes qui ont cliqué leur accord avec le maire Tremblay ont fait le geste pour nuire au Parti québécois, tout simplement - mais sans conscience.

S’il n’y avait pas, en triste supplément, les défenseurs du patrimoine pour tout confondre, pour amalgamer la laïcité de l'État avec la destruction des églises ! Faut le faire ! J'ai des amis, intelligents, athées, qui sont favorables au maintien du crucifix à l'Assemblée nationale, que pour cette raison, le patrimoine – raison à mon avis aberrante, puisqu'un crucifix, ça se déplace, ça se range, ça se conserve dans un musée. Quand, en 1977, le gouvernement péquiste de René Lévesque a décidé d'abolir la prière à l'Assemblée nationale, ça a crié, du côté des banquettes libérales, et c'était, à les entendre, un vrai scandale, l’œuvre d’un mécréant; plus personne, depuis, ne conteste le « moment de recueillement », parfaitement neutre. J'en ai assez, vraiment assez, de ces histoires à n'en plus finir pour ce qui n'existe même pas, ni comme un vieux Monsieur à barbe, ni comme une Chose flottant dans les Cieux, ni comme une Entité créatrice, qui nous surveillerait du Très-Haut, qui dicterait ses désirs et ses ordres, qui froncerait du sourcil quand les Benhabib de ce monde osent parler de laïcité, un Dieu qui prônerait une morale écrasante, sexuelle, vestimentaire, une parade graduée comme une échelle, allant du meilleur jusqu'au pire, avec l'enfer au bout du compte, divinement calculé. Contre l'offensive catholique intégriste de Mgr Ouellet, sur laquelle s'aligne le maire Tremblay, il y a la science, la NASA, la modernité, l'évidence. On s'en sortira, de cette hypocrisie, quand les athées, les non-pratiquants, cesseront de faire baptiser leurs enfants, et de magnifier leurs morts à l'église. On s'en sortira quand les athées, et les non-croyants cesseront de se demander, torturés et parfaitement ridicules, si on doit, après les écoles, sortir le crucifix de l'Assemblée nationale. Qu'on le sorte, bon dieu, et qu'on le mette au musée du Québec, souvenir malheureux de la Grande Noirceur qui se prolonge, encore, jusqu'à maintenant, dans la Grande Imbécillité.

Du bien, dans toute cette sale affaire ? Oui. Un pas de plus vers la laïcité complète de l'État, à l'encontre de ce que prescrit pourtant, terriblement arriérée, la constitution canadienne, qui reconnaît, sans blague aucune, la « suprématie de Dieu ». Et, peut-être, une sensibilité nouvelle, de nos compatriotes des communautés culturelles, vers le Parti québécois, qui n'a jamais été, tant s'en faut, leur persécuteur ou leur ennemi.