mardi 29 mai 2012

29 MAI 1453: LA CHUTE DE CONSTANTINOPLE


Source: http://tomatoesfromcanada.blogspot.ca/2011/12/national-museum-of-american-indian.html



Il y a 559 ans aujourd'hui même, Constantinople tombait aux mains des Turcs, qui en faisaient Istanbul. C'était là l’aboutissement final de l'empire romain, version orientale. 
 
Peu d'événements dans l'Histoire de l’Humanité ont eu des conséquences aussi décisives - et catastrophiques - que celui-là. Pour n'en signaler qu'une seule, Christophe Colomb avait deux ans, au moment de la chute de Constantinople. Jeune adulte, il en a bien connu l’impact en Europe, comme tous ses contemporains, surtout les hommes de la finance, les banquiers. Son aventure meurtrière en Amérique est indissociable de l'événement de 1453, encore que la recherche historique a évolué, et qu'on sait aujourd'hui que c'est la «fuite des capitaux» vers l'Orient turc, en espèces sonnantes, qui a provoqué la contraction de la masse monétaire en Europe, et partant, la recherche de nouvelles sources de métaux précieux vers l'Afrique et l'Amérique, et non le blocage des routes terrestres vers l’Asie. Le papier - les fameuses lettres de change -  s’accumulait, les gens de finance s’inquiétaient sérieusement : comment finiraient-ils par convertir ce papier, et par être payés, enfin, en espèces réelles, d’une valeur incontestable ? Ces gens ne faisaient pas de bénévolat : du commerce, bien sûr, et beaucoup, beaucoup d’investissement dans la chair à canon… C’est cette conjoncture qui explique l’aventure à venir de Christophe Colomb. La science et les progrès dans la navigation de haute mer, oui, ça explique un peu ; mais les besoins du grand capital, ça explique beaucoup, énormément, bien davantage que les espoirs supposés de Dieu. 
 
Les Turcs n'ont donc jamais bloqué la route de la soie. Cependant, ils ont prélevé des droits, sur les «épices» et autres marchandises de luxe exportées des ports du Proche-Orient vers Venise, par exemple. En Europe, le fric réel, palpable, dur et fiable comme une pièce de monnaie en or véritable, se faisait de plus en plus rare.  Hélas pour eux, les Indiens d'Amérique, ceux au sud du Rio Grande, connaissaient l'or et l'argent. C’est ce qu’a vu, lucide, avide, criminel protégé par la distance et motivé par ses bailleurs de fonds, soutenu par la complicité des voyous qui formaient son équipage, Christophe Colomb, dès octobre 1492. Avec la « découverte » des peuples indiens d’Amérique commençaient la pire opération de pillage, et la pire tragédie génocidaire de l'Histoire: quelque chose comme 60 millions de morts. Dès 1492, Colomb écrivait : « Avec seulement cinquante hommes, nous pourrions les soumettre tous et leur faire faire tout ce que nous voulons. » L’année suivante, pour bien convaincre son banquier du sérieux de l’affaire énorme qui se préparait en Amérique, il lui met les points sur les i: «… les rivières, nombreuses, (…) charrient presque toutes de l’or »… Et dans son journal, il notait, inconscient de la parfaite immoralité de ses mots: « L’or est chose excellente. Quand on le possède, on fait tout ce que l’on veut en ce monde, et jusqu’à conduire les âmes en Paradis ». Le colonialisme commence. Et avec lui, la terreur contre les populations indigènes, populations indigènes vite réduites aux travaux forcés dans les rivières et bientôt dans les mines.
 
Certains s’indigneront. Las Casas, par exemple, qui résumera ainsi l’opération de conquête: « Notre activité [ à nous, Espagnols, ] n’a consisté qu’à les exaspérer [ les Indiens], les piller, les tuer, les mutiler et les détruire. Peu surprenant, dès lors, qu’il essaient de tuer l’un des nôtres de temps à autre… L’amiral [Colomb], il est vrai, était à ce sujet aussi aveugle que ses successeurs et si anxieux de satisfaire le roi [ et ses banquiers ] qu’il commit des crimes irréparables contre les Indiens. »

Heureusement, nous n’en sommes plus, de nos jours, avec les commerçants, les banquiers, et autres gens d’affaires, à ces temps obscurs, où la recherche de l’or, doré ou noir, pourrait encore une fois tout permettre, guerres illégales, meurtres et barbarie.





dimanche 27 mai 2012

LA MÉMOIRE TRAHIE DE TYLER CLEMENTI


Pont George-Washington, NY. Source: http://www.journeyetc.com/travel-ideas/best-bridges-on-the-pages-of-the-record-books/



J’étais en vacances, au loin, pendant qu’un tribunal américain mettait fin, par le prononcé de la sentence, au procès de Dharun Ravi, accusé d’actes d’intimidation exercés à l’encontre de Tyler Clementi, 18 ans. Le jeune homme avait trouvé le piège, l’humiliation, la rigolade cynique délibérément planifiée contre sa personne, le viol de son intégrité et, surtout, le mépris de son orientation sexuelle, tellement insupportables qu’il s’est suicidé en se jetant, de honte, du pont George-Washington, à New York. L’horreur absolue. Tyler Clementi a laissé une lettre, s’est expliqué, a dénoncé ; il a fait le sacrifice de lui-même, qu’il a spectaculairement théâtralisé, pour que le message porte, loin, longtemps. Sa souffrance était intolérable.

Et quelle est la punition infligée à Dharum Ravi, qui ne s’est jamais, jamais excusé, qui n’a jamais, jamais dit regretter ? Trente jours de prison, quelques centaines d’heures de travaux communautaires. Et pourquoi une peine si dérisoire ? Parce que le tribunal ne jugeait que de l’intimidation, et non de la conséquence tragique qu’elle a entraînée. Le suicide de Tyler Clementi, je vous le rappelle, est indissociable de son homosexualité, de sorte que son orientation sexuelle est évidemment au cœur de l’affaire, aggravée par le viol de son intimité, filmée, dévoilée à un jeune public qui en a cruellement redemandé. Et pourtant, Ravi n’aura que trente jours de placard, pour crime d’intimidation, pas même pour crime haineux. Le président Obama a pourtant vu l’affaire comme un exemple parfaitement évident — affreusement édifiant — de haine homophobe. J’écoutais la télé, sur CNN, un reportage où on parlait de la sentence, et j’étais renversé, humilié, très en colère au vu et au su de la sanction, qu’une commentatrice évaporée trouvait très bien. Mon copain m’a entendu prononcer quelques gros mots, à l’encontre d’une justice absurde, qui s’aveugle consciemment, volontairement, malgré le sermon apparemment dur et tranchant du juge, prononcé que pour épater la galerie.

Faut-il, si un automobiliste ivre tue un jeune homme gay ( ou n’importe qui d’autre, un Noir, ou un itinérant, ou un malade mental, enfin, vous voyez, une personne d’une de ces minorités pour lesquelles on a le respect collectif si vacillant, ) distinguer l’ivresse au volant de sa conséquence ? Faut-il encore considérer les hommes ( et les femmes ) gays comme des sous-humains, au point de ne juger leur suicide que comme anecdotiques, conséquence malheureuse, mais marginale, du réel problème, du vrai crime celui-là, celui de l’intimidation, perpétrée par un jeune imbécile, Dharum Ravi, qui n’avait rien d’autre à faire que de perdre son temps à s’amuser aux dépens d’une tapette ? Et tiens, à propos, combien de temps, au juste, imposait-on aux Blancs qui intimidaient, jusqu’à les tuer, les Noirs américains dans les années 50, dans cette admirable démocratie morale et chrétienne que sont les États-Unis d’Amérique ?

Violé, méprisé, révélé malgré lui, Tyler Clementi s’est suicidé. Il est mort. Mort. Mais la parodie de justice qui a réglé le sort de son tortionnaire a trahi sa mémoire. Nous serons nombreux, je l’espère, à ne jamais l’oublier.



Post-Scriptum : Le 19 juin 2012, Dharum Ravi a été libéré de prison, après y avoir purgé seulement 20 jours de sa peine... de 30 jours. Il s'est bien conduit, il a travaillé, bref, on lui a donné son congé. Voilà ce qu'il en coûte de violer, de VIOLER l'intimité d'un jeune homme homosexuel, et de l'avoir poussé à la mort. J'ai honte. À l'instant présent où j'écris ces lignes, je déteste l'humanité tout entière, le mépris dans lequel elle nous tient, et sa prétendue normalité.
Source: http://www.huffingtonpost.com/2012/06/19/dharun-ravis-release-jail-served-20-days_n_1608329.html









vendredi 11 mai 2012

LA MACHINE À FAIRE DES RICHES




1789: la noblesse ( et le clergé ) écrasent l'immense majorité du peuple français. L'injustice était largement fiscale...



Le prof Léo-Paul Lauzon a écrit un article de blogue, le 7 mai dernier, il y a donc quelques jours à peine, que je ne peux m'empêcher de commenter, tant le prof dit exact et vrai. Je reproduis tels quels de larges extraits du texte de M. Lauzon. Ce qui est en italique, et entre crochets, c'est mon petit délire personnel, mes convictions à moi. J'imagine que M. Lauzon ne s'offusquera pas que je me sois servi de son billet: l'intention est très pédagogique, et enseigne, modestement, comment faire une analyse de texte. Profitons de ces temps de grève pour s'instruire encore ! Je resterai prof à vie, j'imagine !

Transcontinental est une importante entreprise québécoise fort présente dans l’imprimerie, dans les journaux et hebdos régionaux, et aussi propriétaire du journal Les Affaires, média qui sert de courroie de transmission à la classe dominante. 

[ La classe dominante, faut-il le rappeler, ce sont des hommes et des femmes, mais qui ont cette chance particulière, ce mérite singulier de pouvoir jouir à l'infini des délices de la vie, et qui n'ont aucune intention, aucune, que ça ne s'arrête, jamais. Pourquoi se priver, quand on a la bonne fortune d'être uniques, exclusifs, et de se régaler d'autant plus que, ce qu'on a, l'immense majorité ne peut qu'en rêver ? Tout le plaisir de la vie vient de là, justement. Ce qu'on a, on ne l'a pas volé ! La classe dominante a là-dessus la conscience nette et tranquille. Elle ne s'inquiète pas du tout des quelques truands qu'on va sacrifier à la Commission Charbonneau. Le bûcher va faire quelque fumée, les sauvages vont s'en réjouir: on aura sacrifié à la jalousie des plus incapables, ces braillards bougons toujours insatisfaits. On les aura dupés, une fois de plus. Ça ne sentira que meilleur ensuite.  ]
  
[ Or donc les journalistes de Les Affaires ] sont évidemment favorables à la privatisation des services sociaux, de nos sociétés d’État et de nos ressources naturelles et [ sont ] enfin partisans du principe de l’utilisateur-payeur, donc de hausses substantielles dans les frais de scolarité à l’université [ sans oublier ...] les garderies, le transport en commun, les autoroutes et les ponts, les frais dits « modérateurs » en santé, l’eau et l’électricité, etc. Ils préconisent ces mesures fiscales et régressives au nom du principe que chacun doit faire sa juste part, expression chère aux libéraux par les temps qui courent. 

[ Sa « juste part », notez-le bien, veut dire, ici, que ces messieurs-dames des beaux quartiers, qui se marient entre eux, fréquentent les mêmes restos et les mêmes clubs sélects, privés comme de juste, paient plus que la part qui leur est convenable pour fournir au trésor public. Ils le répètent souvent. Le gouvernement le confirme: 40 % du fric public provient de celles et ceux qui gagnent plus de cent mille dollars par année. C'est la vérité vraie, Dieu en est témoin. Il n'y en a pas d'autres. Et pourtant... ]

[ Et pourtant, imaginez-vous donc que ] on vient d’apprendre que la compagnie mère Transcontinental, qui réalise des profits de plus de 100 millions $ chaque année, ne paiera pas d’impôts sur le revenu, ni au fédéral, ni au Québec au cours des deux prochaines années. Tout simplement merveilleux en termes de création de richesse pour une minorité et de [ création de ] pauvreté pour la majorité. 

[ Merveilleux ! Le paradis existe, c'en est la preuve, seulement il est ici bas, sur Terre, et ces gens l'ont compris depuis longtemps. Quel bonheur de voir ce bon peuple se fanatiser de religion, s'entredéchirer pour comprendre, au mieux, la volonté « divine » suprafiscale ! Pendant que les crétins de la classe moyenne, pendant que les travailleurs du secteur primaire à nouveau en expansion, discutent de halal, de mariage gai, d'avortement, de guerre sainte, d'attentats-suicide et de paradis pour les justes, les gens de bien leur en passent une belle, encore une fois ! ]

Comment ?

Grâce à l’utilisation de pertes fiscales acquises d’autres compagnies, un subterfuge fiscal condamné récemment par l’OCDE et qui, en 2000 seulement, aurait occasionné des pertes fiscales pour les gouvernements de plusieurs milliards$. Seulement en mettant fin à cette arnaque (...) abusive des pertes fiscales reportées, on pourrait financer adéquatement nos services publics, rendre gratuites les études universitaires, réduire la dette publique et éliminer les déficits gouvernementaux. 

[ Oui, mais voilà, pourquoi ferait-on un acte d'altruisme social aussi insensé, se demandent les profiteurs de la classe dominante, alors que la dette et les déficits sont incroyablement rentables, pour nous, de la classe dominante ? C'est admirable ! On ne paie pas les impôts qui seraient nécessaires au bien commun, et la dette nous rapporte le double, le triple, le quadruple de ce qu'on y a investi ! ]

Une petite dernière ? En 2010, Rémi Marcoux, le propriétaire de Transcontinental vend pour 58 millions d’actions de sa compagnie, comme beaucoup d’autres le font, et ne paie aucun impôt sur ce gain de plusieurs millions grâce à l’utilisation d’une autre échappatoire fiscale que sont les fiducies familiales et les instruments financiers dérivés. Qui va payer à la place de monsieur Marcoux le financement public de nos services sociaux, notamment l’éducation, je vous le demande ?

[ Ben les crétins ! Et à court terme, les étudiants universitaires ! Surtout celles et ceux en arts, et en sciences humaines, qui déjà paient pour celles et ceux qui auront par la suite les plus gros salaires ! Ce que c’est fantastique, le monde, quand même, quand on y pense sérieusement: on ne cesse de s'étonner de comment ça marche ! ]
  
Il serait pertinent (c’est juste une suggestion) que [ les journalistes de Les Affaires ] épiloguent sur les notions d’équité, de justice sociale, de juste part fiscale, de bien commun, de responsabilité sociale, etc. en prenant comme exemple des faits réels qu’ils connaissent bien : leur employeur, Transcontinental et leur boss Rémi Marcoux. Cela pourrait faire l’objet d’un vrai débat auquel je suis impatient de participer afin de mieux informer la population sur la véritable nature des corporations et des gens riches et célèbres. Assuré que Richard Martineau à LCN jubilerait à l’idée d’un tel échange.








mercredi 9 mai 2012

APPEL CONTRE LA PEUR


Paul-Émile Borduas, Cimetière glorieux, 1948



Le règne de la peur multiforme est terminé.

Dans le fol espoir d'en effacer le souvenir, je les énumère:

peur des préjugés - peur de l'opinion publique - des persécutions - de la réprobation générale

peur d'être seul sans Dieu et la société qui isole très infailliblement

peur de soi - de son frère - de la pauvreté

peur de l'ordre établi - de la ridicule justice

peur des relations neuves

peur du surrationnel

peur des nécessités

peur des écluses grandes ouvertes sur la foi en l'homme - en la société future

peur de toutes les formes susceptibles de déclencher un amour transformant

peur bleue - peur rouge - peur blanche: maillon de notre chaîne

Paul-Émile Borduas, Refus global, 1948 ( extrait )

*

Le printemps québécois hésite. L'année 2012 est immobile, figée dans des certitudes contraires, paralysée par le poids terrible d'hypocrisies dogmatiques qui, pour se protéger, excitent la réprobation générale. Peut-être vaut-il la peine de relire Borduas, et se souvenir du long hiver qui fut le sien, en exil, sacrifice qu'il a fait de sa liberté pour la liberté. Borduas est mort le 22 février 1960.  Il n'a rien vu de la Révolution tranquille, et de la fabuleuse jeunesse des années 60. La jeunesse actuelle est tout aussi fameuse. Elle n'a peur de rien. Elle transforme. Elle m'apprend. Elle est bel et bien la petite-fille de Borduas; lui en aurait été content.




lundi 7 mai 2012

PLEINE LUNE SUR PARIS

Photo: VegaStar Carpentier. Publié sur le site de la NASA.

Pleine lune au-dessus de Paris, dans la nuit du samedi 5 mai, au dimanche 6 mai.

La lune semble immense, pas seulement du fait d'une illusion d'optique; mais parce qu'elle était bel et bien à une des distances les plus rapprochées de la Terre que lui permette son orbite.

Même à Montréal, même sur ma pauvre rue, c'était superbe.

Ce dimanche 6 mai, François Hollande a été élu Président de la République française; il n'y a guère longtemps, on aurait vu, dans cette lune féérique à la veille du grand jour, un présage, un signe ( heureux ? ) du destin.

Cette nuit, je m'ennuie de Paris. Cette nuit, j'envie le vent de liberté et d'égalité qui souffle sur la France. Cette nuit, j'envie les Français.







samedi 5 mai 2012

GRÈVE PERDUE, VICTOIRE (NÉO)-LIBÉRALE


( Source inconnue de l'image: désolé ! )



Douze semaines de grève, menée par des étudiants magnifiques, mais profondément divisés, et dont le mouvement de contestation, pour spectaculaire qu'il ait été, s'épuisait, de toute évidence, fatigué par son propre effort, trop long sans rien gagner, ruiné devant l'opinion publique par quelques militants extrémistes qui ont ravagé le rapport de force à coups de briques, de pierres, de boules de billard, de bâtons, de masques, de provocation policière et de folie.

Douze semaines de grève pour aboutir à une entente dont seuls, seuls l'État et le Parti libéral du Québec, sortent gagnants. 

C'en est fait, à tout jamais, des droits de scolarité à bon compte, qui ont permis le formidable rattrapage scolaire que le Québec a accompli depuis plus de 40 ans. C'en est fait, en tout cas le risque est gros, de la mixité sociale en milieu scolaire, particulièrement universitaire. Les droits de scolarité font un bond spectaculaire, dès la session d'automne 2012. On ne reviendra jamais en arrière. Même le Parti québécois, dans l'hypothèse peu probable de sa victoire majoritaire aux prochaines élections générales, ne pourra annuler la hausse de ces droits, puisque le mouvement étudiant vient de les accepter, comme d'une réalité désormais permanente, irréversible, du financement des universités québécoises.

Acceptation en échange de quoi, au juste ? D'une sorte de moratoire sans le nom ( ce qui enlève tout crédit à la proposition péquiste de « moratoire », et il n’y a pas à dire là-dessus, les négociateurs gouvernementaux l'ont eue, l'affaire ! ), pour une session seulement, de ce qu'on appelle les droits afférents — les droits à payer pour les équipements sportifs, les photocopieuses et le papier à imprimerie, ce genre de truc, — droits que les étudiants n'ont la garantie de leur suspension que pour une session seulement, qu'une seule session, la prochaine.  Par après ? On verra, on verra sur ce qu'on peut économiser des dépenses somptuaires des universités. Qui peut croire qu'il y a là quoi que ce soit d'une résolution au conflit, qui était éminemment moral, parce qu'il portait sur le principe fondamental de la démocratie scolaire ? Tout le monde sait parfaitement, en milieu collégial, que les droits afférents sont depuis toujours un moyen détourné pour augmenter les droits de scolarité, sans qu'il semble qu'on remette en question le principe de la gratuité scolaire.

Alors, alors, comment expliquer que les combattants magnifiques aient accepté une pareille entente, qui consolide la hausse des droits de scolarité sur 7 ans, plutôt que 5, même compensée par un régime de prêts et bourses légèrement plus généreux, régime qui sera vite piégé par un relèvement, d'ici deux ans, trois ans, des droits afférents ? 

Parce que ces jeunes hommes, cette jeune femme, n'avaient plus le choix. Parce que le conflit s'éternisait, devant une opinion publique largement indifférente, quand elle ne devenait pas franchement hostile. Parce que le gouvernement a été le plus tenace, le plus manipulateur, et le plus fort, lui qui n'avait pas, soir après soir, à marcher dans les rues sous la menace d'une intervention policière. Parce que sous la pression, inouïe, de toute la société civile, les leaders étudiants ont cédé. Qu'aurait-on fait à leur place ? Nous sommes en économie néo-libérale. Nous sommes en période préélectorale. Nous sommes loin, archi loin, de toute révolution.

Ce qui restera, c'est le souvenir d'une crise sociale majeure. Ce qui restera, c'est le souvenir d'une jeunesse extraordinairement brillante, d'une élévation morale exemplaire. Mais ce qui restera, aussi, ce sont des droits de scolarité universitaires désormais très élevés, privilégiant une élite, qui déjà bénéficie d'un réseau privé d'enseignement que le bon peuple subventionne à hauteur de 80 %. ( Le réseau de la santé attend son tour ! Beaux revenus, belles cliniques, pour le beau monde ! )

La grève est tragiquement perdue. Mais je ne crois pas, honnêtement, qu'il aurait pu en être autrement. Sauf la violence, la casse, les blessés, les consciences meurtries, les jeux étaient faits d'avance, tout comme ça l'était fait, pour les Indiens, à qui on promettait naguère leurs droits pour aussi longtemps que couleraient les rivières. 






mardi 1 mai 2012

LE DALAÏ-LAMA BÉNIT L'INDÉPENDANCE DU QUÉBEC !



Capture d'écran du site de la CBC News



Je me promets souvent de ne plus parler politique sur ce blogue. Mais là, devant cette nouvelle qui va laisser M. Harper et M. Mulcair sans voix, je ne peux résister à l'envie de quelques mots vite faits bien faits ! Regardez bien le spectacle, demain, de MM. Mulcair et Harper: ils vont vite la retrouver, leurs voix, solennelles, et prendre le ton grave, approprié, des grandes — et sublimes — occasions; d'un commun arrangement, ils vont s'accorder, chant magnifique, pour moduler, bien évidemment, ce que le Dalaï-Lama a voulu dire, et faire déclarer au saint homme que, comme de juste, le Canada est le meilleur pays au monde, qu'il est indivisible, et que la cause des Québécois, tout comme celle des Indiens d'Amérique, n'a strictement rien à voir avec le juste combat des Tibétains... 

Et pourtant. 

J'aime beaucoup, depuis toujours, Maria Mourani.

Et je signale que c'est Josée Legault qui, sur Twitter, vient tout juste d'attirer mon attention sur cette bienheureuse nouvelle — qui sera sans suite, comme de juste.