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samedi 23 juillet 2011

PARLEMENT DU CANADA, 1849

Source: http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/1f/Parliament_buildings_Montreal_1849.jpg



En avril 1849, une révolte particulièrement violente éclate à Montréal. Les insurgés, Anglais, s'en prennent - entre autres et surtout - à l'édifice du Parlement du Canada-Uni, qu'ils incendient. Le gouverneur, Lord Elgin, vient de quitter les lieux; en sortant par la porte principale, sur l'actuelle rue McGill, il se fait huer, chahuter, abreuver d'injures; sa voiture est bombardée d'oeufs pourris. Les députés, qui sont en session, s'échappent de justesse quand le feu éclate. Les boyaux d'arrosage ont été crevés, les conduites de gaz percées. L'incendie est formidable. En brûlant, l'édifice emporte avec lui un mobilier, des oeuvres d'art, et surtout une bibliothèque parlementaire, collection, unique en Amérique, de 25,000 bouquins, initiée au frais du Parlement ( et des citoyens ) du Bas-Canada, au tout début du 19ème siècle. Ce qui brûle, c'est l'essentiel du patrimoine politique national, surtout canadien-français. La perte est irréparable. La mémoire collective est trouée, à jamais atteinte; l'oubli deviendra plus que jamais la norme politique convenue.

Pourquoi ? Lord Elgin vient d'apposer sa précieuse signature, la sanction royale, au bas d'un projet de loi du gouvernement Lafontaine-Baldwin, qui a pour but d'indemniser les Canadiens ( du Canada-Est, c'est à dire les Canadiens français ) qui ont essuyé, sans avoir pris les armes et participé aux insurrections patriotes, des pertes matérielles considérables en décembre 1837. La répression faite par l'armée britannique contre les Patriotes avait été atroce, effroyablement vengeresse, aveugle, haineuse - on dirait aujourd'hui, très certainement, raciste. L'état de choc dans la population civile avait été considérable, d'autant plus que tout le monde français d'alors était potentiellement visé, que plusieurs ont été agressés alors qu'ils n'avaient pas bougé, faute de temps ou d'intention. Voilà ce que le Parlement de 1849 voulait réparer. Voilà ce que la communauté anglaise de Montréal ne pouvait accepter, si peu de temps après la tentative de révolution nationale de 1837. Voilà pourquoi une loi identique avait pu être votée et appliquée sans problème pour l'ancien Haut-Canada, mais qu'il était inconcevable, radicalement inacceptable que l'argent du contribuable anglais puisse être versé à des « nouveaux sujets », les Canadiens, si foncièrement, si évidemment déloyaux à Sa Gracieuse Majesté. Mieux valait incendier le Parlement. La tragédie a eu lieu le 25 avril 1849. 

Montréal en est restée longtemps discréditée. Il n'était plus question que la capitale de la colonie soit dans cette ville, malgré l'évidence des avantages à ce qu'elle y soit. Ottawa, capitale fédérale, allait surgir ( du néant ! ) et de ces événements de 1849. On a par la suite voulu oublier; et on a oublié, sans jamais rappeler la parenté pourtant évidente entre 1849, 1917 ou 1970 (crise de la conscription, crise d'octobre).

On a remis à jour les fondations de l'ancien Parlement du Canada, cet été, dans le Vieux Montréal, place d'Youville. Je voulais voir ça, ça m'émeut toujours, ces traces visibles du passé; je m'y suis rendu, avec V. La chaleur était écrasante. Il y avait peu de visiteurs. On a eu droit à une guide, pour nous seuls, pendant plus d'une heure et demie ! Elle en savait plus que moi, et j'en savais - souvent - plus qu'elle. Belle complémentarité, dont on a tiré, tous deux, beaucoup de plaisir. Mais détail amusant, V. est anglophone, et la jeune guide, pour expliquer les événements, marchait, comme on dit, sur des oeufs ! Je me suis chargé de nommer un chat, un chat.

Aux étudiants, j'ai souvent dit que le Canada actuel était probablement la démocratie qui censure le plus son histoire. J'en avais, hier, pendant cette belle visite aux ruines du vieux parlement, un bel exemple, frappant.