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lundi 24 septembre 2012

L'IMPÔT ? C'EST DU VOL !


( Source: Cyberpresse. 23 septembre 2012 )



La hausse d'impôts du PQ (pas du gouvernement, non, du PQ) condamnée: c'est le titre d'un article de la Presse, signé Philippe Teisceira-Lessard. Un jeune homme. La relève intellectuelle de la droite. Un chantre, parmi d'autres, d'un profil social à la Mitt Romney, où la richesse sert la multitude et la fait travailler. 

Et elle est condamnée par qui, cette spoliation fiscale ? Une incommensurable foule en colère ? Une gigantesque manifestation de casseroles agitées ? Une prise révolutionnaire du Black Watch par une multitude vociférant: « Aux armes, citoyens ! » ? Non: la hausse d'impôts est condamnée par la Coalition Avenir Québec et le Conseil du patronat. Oh ! Oh... Voilà donc la source unanime de la révolte de masse contre l'horrible PQ. Respect. Ce qu'on lira dans l'article, c'est la science économique en action, c'est le souci économique de ceux qui savent, et qui, comme de juste, n'ont pas d'intérêts particuliers. 

Ce qu'il faut savoir, c'est que cette hausse des impôts, qui affectera celles et ceux qui touchent plus de 130,000 dollars par année, est d'un tel « manque de respect » qu'elle en est « inacceptable », surtout quand on sait que les Québécois sont les plus taxés en Amérique du Nord: un scandale, Madame, oui, un scandale qui empêche les plus fortunés de « planifier leur budget » (de planifier leur budget ! c'est écrit tel quel ! la blague — inconsciente ? cynique ? — est bonne ! ) Et attention, que l'article nous dit, si nous ne sommes pas gentils avec les gens qui gagnent, quoi, 300,000, 400,000 dollars par année, ils pourraient bien s’envoler, aller là où ils pourraient bénéficier d'une fiscalité tellement plus compréhensive avec la fortune: quelque chose comme le syndrome belge qui frappe la France ces jours-ci, et qu'on importe allègrement, c'est gratuit. Mme Lise Payette disait des gens d'affaires qu'ils n'ont pas d'âme, pas de patrie. On se prend à nouveau à la croire: elle dénonçait pourtant la chose il y a déjà plus de 30 ans.

C'est là (je n'ai rien soustrait à l'article) tout l'essentiel de la condamnation généralisée dont la Presse se délecte les babines, et pense en alerter l'opinion. On a eu le printemps érable. On aura l'automne rouge feu: des masses humaines hurlant leur colère, dirigée contre la première ministre Marois. Paul Desmarais marchera en tête, arborant la feuille d'érable érubescente comme une cocarde ! Ce qu'ils rigoleront, quand même, quand ils se rappelleront la blague, le 25 décembre prochain au soir, nostalgiques des Noëls anciens où les pauvres étaient de vrais pauvres, éléments magiques — et comme tels cruciaux  — de la Nuit où le privilégié se rachetait l'humanité à si bon compte...

PS ( en date du 7 octobre 2012 ):
«Behind the pretenses to egalitarianism that dress up confiscatory Quebec tax laws and repressive language laws, the real driving ambition has been to push the non-French out of Quebec, buy up the real assets they cannot physically take with them, especially their mansions and office buildings in Montreal, and eliminate up to half the emphatically federalist votes in the province.» Conrad Black, The National Posthttp://www.nationalpost.com/m/wp/full-comment/blog.html?b=fullcomment.nationalpost.com%2F2012%2F10%2F06%2Fconrad-black-as-quebec-decays-toronto-seizes-greatness





jeudi 26 avril 2012

IMPOSSIBLE RÉVOLUTION



Source: Photo - Le Devoir, Jacques Nadeau





Au point où en sont les choses politiques et sociales, au Québec ( crise majeure, je le spécifie pour mes amis lecteurs de l'étranger, provoquée par une très forte hausse des droits de scolarité, décidée et décrétée par le gouvernement du Québec, ) peut-être faudrait-il collectivement se rappeler quelques évidences incontournables.

1. Il n'y a pas, il ne peut pas y avoir de révolution au Québec. La jeunesse a beau être nombreuse dans les rues, et aller à la casse avec un entrain qui laisse le téléspectateur sidéré, cette jeunesse que j'aime, à qui j'ai enseigné ( génération après génération ) toute ma vie, est isolée sur la grande question, la question essentielle qu'est le partage équitable de la richesse, quel que soit le processus pour y arriver, par exemple au moyen d'une justice fiscale rigoureuse. La jeunesse est isolée: elle n'a pas d'alliés sociaux qui l'appuient dans ce qui pourrait devenir une authentique poussée révolutionnaire. Les travailleurs cols bleus ou cols blancs, la classe moyenne inférieure, les retraités appauvris, année après année, par des rentes qui deviennent  fragiles, ont souvent une empathie active sur Twitter pour la cause étudiante, mais certainement pas au point de provoquer une constellation de colères sociales, préalable à une authentique poussée révolutionnaire. La jeunesse elle-même est divisée sur la question du sens social à donner à son mouvement de contestation. La société québécoise n'est pas encore prête de changer là-dessus, tant s'en faut, et tranquille qu’elle est. Le patronat est solidaire, de tout temps, en toutes circonstances, sur ce sujet de l'ordre social, comme sur tous sujets d'ailleurs, avec le parti libéral du Québec, qui lui écarte la CLASSE parce que précisément, cette association étudiante prétend développer un projet social plus large que la cible unique de droits de scolarité accessibles au plus grand nombre. Quant à la police, elle fait son travail, « neutre », dit-elle, c'est-à-dire au service de l'État, qui lui est « bourgeois ». Ce ne sont pas là des considérations anciennes: c'est encore comme ça que les choses sont. 

Il faut dire ces évidences, même désagréables à entendre, parce que le mouvement étudiant se dirige tout droit vers un cul-de-sac. Ça me désole. La cause est juste. J'y crois. Mais privilégiant la voie radicale, de l'affrontement dans les rues, du discours ultra à la télé ( que j'admire, bon dieu, Gabriel Nadeau-Dubois est à proprement parler admirable, ) et n'entendant rien, du moins en apparence, des gens de bien, qui cherchent une solution, une médiation, un report de la hausse, une alternative de négociation multipartite qui puisse remplacer le choix décrété par l'État, le mouvement étudiant laisse se préparer une répression, brutale, sans appel, qui lui tombera dessus, lui fera tout perdre, capital de sympathie, et validité de la cause, alors qu'il tient bon, après dix semaines, ce qui est proprement stupéfiant. Étudiants, ne parlez plus au gouvernement, ignorez-le; parlez aux autres, à celles et ceux, nombreux, encore influents, qui ont de la sympathie bien réelle pour les principes que vous défendez. Il faut imposer votre point de vue au gouvernement par le biais d'intermédiaires qui seuls, peuvent sauvegarder l'essentiel de votre combat. Sinon, cela risque fort d'être une grève perdue. Et tout cela sera long, très long à reprendre, et à réparer. 

2. Il n'y a pas à douter que l'État, et le parti politique qui en dispose cherchent une voie de sortie, qui ne soit bénéfique que pour eux seuls. L’État ne peut songer, désormais, qu'à des moyens extrêmes pour mettre fin à la crise. Il y a des précédents, et ce serait là une erreur prodigieusement naïve que de penser que l'État ne considère pas ses pouvoirs de législateur. Je ne sais trop à quelle loi spéciale le gouvernement pourrait recourir, puisque la grève étudiante ne relève pas du Code du travail. Je ne sais pas davantage à quelle suspension de libertés civiles le parti libéral pourrait se laisser tenter. Mais si Monsieur René Lévesque lui-même a fini par approuver et cautionner la terrible Loi 111, en février 1983 ( loi condamnée d'abord par le Bureau international du travail, et par la suite par la Cour suprême du Canada, bien que dans ce dernier cas, la Cour ne se soit pas arrêtée au scandale social majeur qu'était la loi, mais plutôt à une formalité constitutionnelle, ) comment penser que Monsieur Charest aurait des scrupules, s'il estimait, lui, qu'il y avait urgence d’agir pour protéger les biens et la propriété ? Je ne suis rien, moi, ni vedette ni personne qui compte ( pas même sur Twitter ! ), je ne suis qu'un obscur professeur de cégep, comme on me l’a déjà dit, sourire en coin; et pourtant je supplie le gouvernement actuel de ne jamais, jamais franchir la ligne de l'interdit, de ne se laisser tenter par aucune mesure qui restreigne ou suspende les libertés civiles, et de laisser les mesures normales de justice suivre leurs cours — c'est le cas de le dire. Il faudrait, là-dessus, être nombreux, très nombreux à en appeler au gouvernement du Québec: il n'y a qu'un moyen, qu'un seul, pour l'amener à être raisonnable, et à discuter, y compris de ses ( mauvais ) choix politiques, et c'est de l'amener, d'avance, à renoncer à tout moyen législatif d'exception. J'appelle ( très humblement ! ) Monsieur Charest à faire une déclaration publique en ce sens. Il doit engager son gouvernement à l'encontre de ce risque, parce qu'en réaction à la violence de la rue, toutes les tentations sont possibles pour un gouvernement, et un parti, en désespoir de cause et de crédibilité.

Voilà.

Bonne chance aux étudiants, et à leurs leaders, qui ont ces jours-ci le dos large, mais les jambes solides. Ils sont beaux; ils sont admirables.