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lundi 18 juin 2012

L'ACCESSION DES FEMMES À L'EXPLOITATION DE L'HOMME PAR L'HOMME


Source: http://www.bonjourdubai.com/modules/newbb/viewtopic.php?topic_id=4797




Depuis 1945, les races sont égales, on ne peut plus dire le contraire sans risquer de fâcheux problèmes. Heureusement d’ailleurs. L’histoire-science ( l’École des Annales, Fernand Braudel, et d’autres encore, nombreux, ) disait déjà cette égalité, et l’anthropologie aussi, remise de ses erreurs grossières du siècle avant-dernier.  L’horreur nazie l’a mieux dite encore, en a convaincu irréversiblement. Mais si les races sont égales, au point qu’il n’y ait même plus de races, à peine des peuples, difficilement des nations sans que certains inquiets sourcillent sévèrement, il y a encore de la marge de manœuvre attentatoire, pour les excités de la différence, du côté des « civilisations ». Ce sont les aires culturelles qui ne sont peut-être pas égales entre elles. C’est ce qui se propose, désormais, en toute modernité, dans tous les milieux. Il faut dire, là-dessus, que le débat est difficile, épineux, et que la Déclaration onusienne, dite universelle, des droits de l’Homme, telle qu’elle est depuis 1948, n’aide pas à simplifier le débat. Et pourtant, il n’est pas si complexe qu’il n’y paraît. Françoise Héritier, professeure au Collège de France, a accordé, là-dessus, au journal Le Monde, le 13 février 2012, une entrevue particulièrement éclairante :

« Le terme "civilisation" est un fourre-tout très vaste. Ce sont de grands ensembles à longue portée historique où se reconnaissent au long cours des schèmes de pensée et des manières d'être, d'agir, de se représenter le monde, identifiables selon de nombreux critères : grands groupes linguistiques, vêtements, habitats, dans leurs grandes lignes, mais aussi religions et cultes, systèmes politiques, systèmes artistiques. On a pu ainsi identifier de grandes civilisations, préhistoriques ou historiques : chinoise, hindoue, grecque, méso-américaine, judéo-chrétienne, bantoue, etc. De grands traits caractéristiques peuvent être catalogués et, à partir de connaissances sommaires, il est difficile par exemple de confondre un objet d'origine maya et un objet d'origine chinoise ou africaine. [ …Cependant ] l’exemple de portée (… qui soit vraiment) universelle (…), celui sur lequel ont été fondées [ toutes ] les sociétés [ c’est ] l'échange et le contrôle des femmes. [ C’est ] le seul trait universel (avec la prohibition de l'inceste) de toute l'humanité… »

Les femmes, les enfants ; l’asservissement sexuel, la possession de la progéniture, la consolidation de la propriété privée par l’identification génétique des biens, et leur transmission par héritage familial, à l’intérieur de classes sociales qui se reconnaissent des intérêts communs : voilà ce qui est bel et bien universel, voilà, en effet, ce qui garantit, au vrai, l’évidente égalité des civilisations entre elles. Elles ont toutes traité leurs femmes et leurs enfants également.

Des femmes, maintenant, parviennent à des rôles et des statuts sociaux historiquement réservés aux hommes. Les enfants sont dorénavant des personnes, les droits parentaux sont considérablement limités ; les enfants sont mieux protégés par la loi, le tabou de l’inceste est renforcé. La propriété privée reste ce qu’elle a toujours été. La richesse a un nom, toujours, mais il est désormais composé, maigre pitance en matière de changements sociaux essentiels. Les femmes aussi transmettent leurs biens par héritage à des enfants génétiquement identifiés. Les classes sociales restent intactes, tout comme l’organisation des pouvoirs. Il sont sexuellement bicéphales, c’est vrai, mais qu’y a-t-il autrement de changé ? Pour le reste, tout le reste, la propriété, l’exploitation, l’inégalité de développement, le partage inégal des ressources, la protection des zones vertes pour les riches, la souffrance humaine, la guerre, la mort, qu’est-ce donc qui a changé ? Rien. Absolument rien. De sorte qu’il nous faut bien admettre que l’asservissement et l’inceste restent les traits essentiels de toutes les civilisations. Seulement, à l’époque actuelle, des femmes sont partie prenante des réseaux de pouvoirs, qui maintiennent, prolongent, aggravent souvent l’écart entre ce qui n’a de cesse d’exister, les classes sociales. Des femmes asservissent des hommes, d’autres femmes. Des enfants connaissent toujours nettement leurs géniteurs, et savent d’avance leurs héritages, bagage génétique comme un autre, plus déterminant que tout autre. Le capital conserve des traits de ressemblance avec les deux parents, hommes et femmes. Dans un bon cours d’histoire, ou d’anthropologie, c’est ce qu’il faut, encore, faire connaître et comprendre : il y a eu une révolution des rôles sexuels, sans révolution. C’est indispensable à savoir.









mercredi 2 mars 2011

La lavandière de Puerto Vallarta




Il y a quelques semaines de ça, la chanteuse Michèle Richard avait parlé, à l’émission Les Enfants de la télé, des « lavandières de Puerto Vallarta », honorables ménagères de la misère et de l’arrière-pays, qui devaient nettoyer leurs vêtements directement à la rivière en utilisant de la roche plate tout aussi durable que la plus solide des Maytag. La chanteuse était allée là exercer son art en bikini, justement grimpée sur une de ces roches lissées par le temps, l’eau et le travail à bras de femmes… Ces dames lui servaient de décor champêtre. Je me demandais, en l’écoutant, quel lien pouvait-elle bien faire en sa tenue légère et le travail dur et acharné des dites lavandières… Peut-être voulait-elle, inconsciemment, justifier sa minceur de l’époque, et en faire un produit de dur labeur… Mystère.
J’arrive tout juste de Puerto Vallarta. J’ai eu du temps superbe. En voyant l’abondance des turquoises, des bleus, des blancs, des verts, je me suis pris à penser à Gauguin, fasciné par le soleil et les couleurs de Tahiti. Rien que ça ! Et je me suis beaucoup promené. Puerto Vallarta est maintenant une très jolie petite ville. Plusieurs artistes ont été embauchés pour embellir la ville. La petite église catholique coloniale a été couronnée en 2009, et l’œuvre est superbe. Sur l’avenue principale, un théâtre à la grecque a été aménagé ; j’y ai vu des spectacles en plein air hautement professionnels. J’y ai vu, surtout, une sculpture remarquable, d’une lavandière d’autrefois, placée tout juste entre la mer, et des condos d’un luxe extravagant, protégés par de hautes clôtures, des serrures électroniques et des gardiens armés… Qui a voulu se moquer de ces riches enfermés dans leurs tours d’ivoire tout blanc, se réservant la plage pour eux seuls, se protégeant d’on ne sait quel danger par des gardiens tout en muscle, armés jusqu’aux dents ? La lavandière est là, devant cet étalage de luxe, qui fait patiemment, perpétuellement son travail, sans colère, sans pointer du doigt ces riches étrangers qui lui volent petit à petit son pays…
Loin de m’inciter à la soumission, la lavandière m’a heurté, choqué, rappelé dramatiquement la délocalisation, l’exploitation de la main-d'œuvre si bon marché du Mexique, le cheap labor à la solde des nouveaux riches et de leurs vêtements souillés. Le Mexique nous habille et nous lave, de plus en plus.
Je suis sûr, sûr et certain que la municipalité de Puerto Vallarta n’a pas placé cette statue au hasard. Elle est précisément là où elle est, pour rappeler le fossé grandissant entre les riches et les pauvres. Elle est là comme une critique sociale voulue et délibérée. La lavandière pourrait s’immoler par le feu, comme ce jeune tunisien sans avenir et outrageusement méprisé par un ordre social parfaitement immoral, déclenchant la révolte que l’on sait, et dont on souhaite qu’elle devienne et reste une authentique révolution. Elle est là pour faire peur, pour donner la trouille aux confortables de toutes sortes qui ne vont au Mexique que pour s’en approprier une parcelle, rejetant le plus loin possible les indigènes qui pourraient se croire encore chez eux. J’imagine qu’il y en a pour trouver cette sculpture fâcheuse, d’un goût douteux, et pour tout dire, franchement, de trop. Elle finira peut-être par être déplacée.
Il y a, dans le vieux Puerto Vallarta, un commerce qui affiche à sa porte cette courte note : « Ici, les Mexicains sont aussi les bienvenus ». C’est tout dire du respect qu’on attend des touristes, et des envahisseurs fortunés qui s’installent en chassant les pauvres de leur connaissance et de leur vue.