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jeudi 21 juillet 2016

LA PAIX , MAIS COMMENT ?




Depuis les événements de Paris et de Nice, je repense souvent à mon enseignement, en histoire des États-Unis, en histoire des relations internationales, et à ce que j’ai pu affirmer, passionnément, aux étudiants, du monde dans lequel nous sommes plongés depuis la dernière décennie du 20e siècle. Je cherche bien évidemment à m’y retrouver, dans ce qui semble trop souvent n’être que du bruit et du chaos. Il y a encore peu de temps, le monde me semblait facilement compréhensible; les événements, même tragiques, trouvaient leur sens dans la profondeur de l’histoire, dans la dynamique de rapports d’exploitation tellement évidents, dans l’horreur froide et calculée, c’est le cas de le dire, de la politique étrangère états-unienne. Je n’avais pas complètement tort, et j’y reviendrai.

Mais détail intéressant, à noter dès l’abord, je repense à mon enseignement parce qu’il y a eu Paris et Nice, bien davantage encore que parce qu’il y a eu les atrocités commises, par exemple, par Boko Haram au Nigéria — et ce fait, à lui seul, en dit beaucoup sur moi, sur mes limites, sur mon attachement puissant à l’Occident d’abord, à l’Occident quasiment seul. Troublant. Et pourtant, j’ai dénoncé. J’ai participé à cette critique virulente de l’Occident, entendons concrètement, les États-Unis d’Amérique, et leur allié docile, en toute matière internationale, qu’est le Canada. J’ai été, je crois, cet intellectuel critique que le système nourrit pourtant bien, qui le sait, et qui comprend si parfaitement la violence de la superpuissance que parce qu’elle lui assure son gagne-pain grassouillet. (Et pourtant, je n’étais pas prof à l’université, mais bien prof « dans un obscur collège de Montréal », comme me l’a dit une collègue qui s’en désolait, et qui, elle, enseignait dans une grande institution de savoir.)

J’enseignais donc que dès le milieu des années 1990 se préparait une redéfinition des objectifs de la politique extérieure américaine, et qu'au cœur de cette redéfinition,  se trouvait Paul Wolfowitz, théoricien, depuis 1969, du bouclier antimissile, du rejet des contrôles en armements, de la supériorité écrasante des É.-U. et de la théorie de la « construction de la menace », qui permettent aux É.-U. d’agir à leur convenance dans le monde et de bloquer l’émergence de compétiteurs potentiels.

J’enseignais que le monde se fragmentait parce que les États-Unis, mettant à profit le drame extrême du 11 septembre 2001, appliquaient désormais, et plus que jamais, une politique de cas par cas, identifiant des États voyous, menant une « guerre contre le terrorisme », guerre qui prenait en charge les intérêts objectifs des É.-U., entre autres ce que « W » appelait le « vent du pétrole » qui donnait la juste direction à suivre, bien simple. J’apprenais aux étudiants, qui s’en doutaient fortement, que les États-Unis ne faisaient qu’aggraver les tensions internationales en convenant officiellement qu’Israël menait, dans les territoires palestiniens « occupés », une variante de cette même guerre contre le terrorisme. Je me désolais que les États-Unis tournent le dos aux institutions internationales, voire même au droit international, ne privilégiant désormais que des « alliances conjoncturelles ». C’était la porte ouverte au crime de guerre: le Royaume-Uni maintenant regrette, s’en excuse piteusement. 

Conséquence inévitable de cette politique préparée, pensée, appliquée sciemment: la sécurité collective mise en place après 1945 s’est effondrée, remplacée par une globalisation qui a refusé, strictement refusé de dissocier la sécurité intérieure de l’Amérique, des biens et des personnes, de la sécurité internationale ainsi violemment contrainte. 

La haine a surgi, bien sûr, plus hargneuse, plus décidée que jamais. Dominique de Villepin le prévoyait déjà, brillamment, dans son intervention au Conseil de sécurité de l’ONU, dès 2003, au moment où se préparait l’agression contre l’Irak.

La haine a surgi. Elle n’est pas insensée, même si elle se greffe sur de jeunes esprits qui peuvent l’être, insensés. 

Cette haine justifie des représailles, d’insupportables actes de guerre et de terreur en milieu civil, auxquels on répond, tant à Washington qu’à Paris, par une « guerre » aussi impuissante qu’elle est ravageuse et meurtrière.

Alors, on enseigne quoi, désormais ? 

Parce qu’il y a menace, tout le monde le sait, de l'abandon de toute réserve par une droite économique, sociale, religieuse, éminemment dangereuse; personne ne doute que Trump, que Marine Le Pen ne puissent prendre le pouvoir, et protéger les puissants en les isolant, à coups de murs, de frontières, de barrières à la libre circulation des personnes, et surtout, à coups d’armes bien réelles de destruction massive. 

Parce qu’il y a aussi menace, tout le monde le sait, d’une excitation hystérique, évidente, de « communautés » culturelles marginalisées, lieux privilégiés d’ancrages fanatiques meurtriers, et absolument sauvages. 

J’essaie de m’ouvrir au monde et à la justice. Je suis conscient qu’on bombarde et qu’on tue, en Syrie, à Paris, massacres dressés en parallèles terribles. Je suis conscient que les aires de civilisation sont divisées, fragmentées, submergées par la haine et le rejet de ce qui chez l’autre étonne, choque, semble si outrageusement différent et scandaleux.

Je ne sais trop, je ne sais plus. Comment rendre impossibles l’exploitation, la guerre, la terreur ? Je me risque toujours à espérer d’une incroyance sereine. Je crois toujours de plus en plus en l’urgence d’une gauche qui ne soit pas celle qui se discrédite à coups de bondieuseries appelées « tolérance », qui en braquent plusieurs par l’inégalité flagrante qu’elles cherchent à instaurer, aussi flagrante, en fait, que l’inégalité criante entre les « mangeurs » et les « mangés ». [Voltaire] J’espère toujours une révolte efficace des exploités, par la remise en question de l’ordre du monde — et là-dessus, malgré les problèmes de corruption, Hugo Chavez manque terriblement à l’appel. J’imagine un monde de droit, imposé par l’hémisphère sud, depuis longtemps majoritaire à l’ONU, qui casse le monopole des Cinq Grands sur les affaires mondiales, affaires le plus souvent désastreusement lucratives au détriment du plus grand nombre, d'ordinaire réduit à la misère la plus abjecte. Parce que si l’État islamique est délirant, conquérant, dévastateur, c’est aussi qu’il a sous les yeux ces miséreux, par millions, abandonnés de tous.

Cri du cœur.





samedi 21 septembre 2013

LA NOUVELLE MÉTHODE: L'EXPLOITATION PAR LA CONSOMMATION


Source de l'image: http://en-avant-marche.blogspot.ca/2013_01_01_archive.html



Marx avait, au 19e siècle, pris conscience de la formation, dans les pays développés, d’une aristocratie de prolétaires. Ces travailleurs, de par leurs conditions de travail, et surtout le salaire qu’ils empochaient, se sentaient de moins en moins solidaires du sort fait au lumpenprolétariat, mais  se voyaient plutôt concernés, directement, par la bonne vieille machine à extraire le capital dont ils profitaient, par la bande.

Le prolétariat ultra-pauvre, il se trouve maintenant, et de plus en plus, à l’étranger. S’il est ici, il est victime de la précarité de l’emploi, parfaitement immorale, et d’autant plus terrible à supporter que le travailleur, constamment menacé par le chômage, subit le chantage au salaire raisonnable, le « seul que l’entreprise peut payer », toujours à la baisse. Tu veux un job ? Accepte un salaire réduit. C’est odieux. C’est généralisé. 

À côté de ces travailleurs temporaires, précaires, menacés, il y a maintenant une nouvelle aristocratie de prolétaires, essentiellement des travailleurs consommateurs lucides, qui ont appris à consolider leur situation économique, et leur inféodation à une société radicalement inégalitaire, en achetant au rabais, sans scrupule ni remords. J’essaie d’éviter les Walmart de ce monde. Je n’y arrive pas toujours. Quel salaire a-t-on versé pour rendre possible l’aubaine dont je profite ? À quel travailleur ? De quel sexe, de quel âge ? La précarité de l’emploi, les salaires à la baisse, le mépris affiché pour des conditions de travail décentes, le dédain, même, pour la simple reconnaissance de ce que l’entreprise doit à ses travailleurs, m’ont toujours profondément scandalisé. J’ai, près de moi, des personnes qui subissent ce genre de conditions de travail. Ça m’interpelle parce que je vois ce que ça fait, au quotidien.






lundi 22 avril 2013

LE SOT, C'EST MOI - UMBERTO ECO


Francisco de Goya. Saturne dévorant son enfant.



« S’imaginer comme élément nécessaire dans l’ordre de l’univers équivaut, pour nous, gens de bonnes lectures, à ce qu’est la superstition pour les illettrés. On ne change pas le monde avec les idées. Les personnes de peu d’idées sont moins sujettes à l’erreur, elles suivent ce que tout le monde fait et ne dérangent personne, et elles réussissent, s’enrichissent, arrivent à de bonnes positions, députés, décorés, hommes de lettres renommés, académiciens, journalistes. Peut-on être sot quand on fait aussi bien ses propres affaires ? Le sot, c’est moi, qui ai voulu me battre contre les moulins à vent. » - Umberto Eco, Le cimetière de Prague, Grasset, 2010.

L'utopiste, le sot, c'est moi aussi. Et pourtant, je sais bien que je ne suis rien dans l'ordre de l'univers; je sais bien que le monde est sans règle ni credo. Il y a des étoiles qui brillent plus que d'autres; il y a des trous noirs qui absorbent tout. Tout cela est sans tourments, pas même inquiet qu'une conscience, essentiellement accidentelle, puisse observer et juger, de très loin, de très, très bas, subalterne sans intérêt, qu'on n'arrive même pas à nommer correctement. Le cadre avec dorures, de peu d'idée, c'est lui que l'on regarde, c'est lui qui hiérarchise l'espace, pourtant il n'est jamais rien de plus qu'une immense vanité, au mieux un reflet de roi, très plat de profil, une chose bête accrochée à un clou. La scène immobile, coagulée sous verre, entourée d'un filet d'or, leurre quelquefois, propose un sens sublime, une lumière inespérée, une stèle spirite dans un cimetière, mais elle se sert de «Dieu» pour racheter son avarice, la plus simple et la plus sordide des idées froides, celle qui réussit le mieux à duper, à exploiter, à cracher sa colère de boutiquier - qui n'a pas de morale, mais que des intérêts, parfois des titres, pire encore des fonctions, mesurées au sol en pieds carrés de droit. 

C'est incroyable, mais c'est comme ça. Ça marche comme ça parce que ça meurt. Et en attendant, ça tue.

Je ne suis pas un influent. Je ne suis pas un installé. Je ne suis ni superstitieux ni croyant. Mais je désespère de n'avoir rien appris, d'être pris avec ma conscience, et de vouloir, encore, me battre contre des moulins à vent, alors que les débrouillards en tout genre rigolent.






lundi 18 juin 2012

L'ACCESSION DES FEMMES À L'EXPLOITATION DE L'HOMME PAR L'HOMME


Source: http://www.bonjourdubai.com/modules/newbb/viewtopic.php?topic_id=4797




Depuis 1945, les races sont égales, on ne peut plus dire le contraire sans risquer de fâcheux problèmes. Heureusement d’ailleurs. L’histoire-science ( l’École des Annales, Fernand Braudel, et d’autres encore, nombreux, ) disait déjà cette égalité, et l’anthropologie aussi, remise de ses erreurs grossières du siècle avant-dernier.  L’horreur nazie l’a mieux dite encore, en a convaincu irréversiblement. Mais si les races sont égales, au point qu’il n’y ait même plus de races, à peine des peuples, difficilement des nations sans que certains inquiets sourcillent sévèrement, il y a encore de la marge de manœuvre attentatoire, pour les excités de la différence, du côté des « civilisations ». Ce sont les aires culturelles qui ne sont peut-être pas égales entre elles. C’est ce qui se propose, désormais, en toute modernité, dans tous les milieux. Il faut dire, là-dessus, que le débat est difficile, épineux, et que la Déclaration onusienne, dite universelle, des droits de l’Homme, telle qu’elle est depuis 1948, n’aide pas à simplifier le débat. Et pourtant, il n’est pas si complexe qu’il n’y paraît. Françoise Héritier, professeure au Collège de France, a accordé, là-dessus, au journal Le Monde, le 13 février 2012, une entrevue particulièrement éclairante :

« Le terme "civilisation" est un fourre-tout très vaste. Ce sont de grands ensembles à longue portée historique où se reconnaissent au long cours des schèmes de pensée et des manières d'être, d'agir, de se représenter le monde, identifiables selon de nombreux critères : grands groupes linguistiques, vêtements, habitats, dans leurs grandes lignes, mais aussi religions et cultes, systèmes politiques, systèmes artistiques. On a pu ainsi identifier de grandes civilisations, préhistoriques ou historiques : chinoise, hindoue, grecque, méso-américaine, judéo-chrétienne, bantoue, etc. De grands traits caractéristiques peuvent être catalogués et, à partir de connaissances sommaires, il est difficile par exemple de confondre un objet d'origine maya et un objet d'origine chinoise ou africaine. [ …Cependant ] l’exemple de portée (… qui soit vraiment) universelle (…), celui sur lequel ont été fondées [ toutes ] les sociétés [ c’est ] l'échange et le contrôle des femmes. [ C’est ] le seul trait universel (avec la prohibition de l'inceste) de toute l'humanité… »

Les femmes, les enfants ; l’asservissement sexuel, la possession de la progéniture, la consolidation de la propriété privée par l’identification génétique des biens, et leur transmission par héritage familial, à l’intérieur de classes sociales qui se reconnaissent des intérêts communs : voilà ce qui est bel et bien universel, voilà, en effet, ce qui garantit, au vrai, l’évidente égalité des civilisations entre elles. Elles ont toutes traité leurs femmes et leurs enfants également.

Des femmes, maintenant, parviennent à des rôles et des statuts sociaux historiquement réservés aux hommes. Les enfants sont dorénavant des personnes, les droits parentaux sont considérablement limités ; les enfants sont mieux protégés par la loi, le tabou de l’inceste est renforcé. La propriété privée reste ce qu’elle a toujours été. La richesse a un nom, toujours, mais il est désormais composé, maigre pitance en matière de changements sociaux essentiels. Les femmes aussi transmettent leurs biens par héritage à des enfants génétiquement identifiés. Les classes sociales restent intactes, tout comme l’organisation des pouvoirs. Il sont sexuellement bicéphales, c’est vrai, mais qu’y a-t-il autrement de changé ? Pour le reste, tout le reste, la propriété, l’exploitation, l’inégalité de développement, le partage inégal des ressources, la protection des zones vertes pour les riches, la souffrance humaine, la guerre, la mort, qu’est-ce donc qui a changé ? Rien. Absolument rien. De sorte qu’il nous faut bien admettre que l’asservissement et l’inceste restent les traits essentiels de toutes les civilisations. Seulement, à l’époque actuelle, des femmes sont partie prenante des réseaux de pouvoirs, qui maintiennent, prolongent, aggravent souvent l’écart entre ce qui n’a de cesse d’exister, les classes sociales. Des femmes asservissent des hommes, d’autres femmes. Des enfants connaissent toujours nettement leurs géniteurs, et savent d’avance leurs héritages, bagage génétique comme un autre, plus déterminant que tout autre. Le capital conserve des traits de ressemblance avec les deux parents, hommes et femmes. Dans un bon cours d’histoire, ou d’anthropologie, c’est ce qu’il faut, encore, faire connaître et comprendre : il y a eu une révolution des rôles sexuels, sans révolution. C’est indispensable à savoir.









mercredi 2 mars 2011

La lavandière de Puerto Vallarta




Il y a quelques semaines de ça, la chanteuse Michèle Richard avait parlé, à l’émission Les Enfants de la télé, des « lavandières de Puerto Vallarta », honorables ménagères de la misère et de l’arrière-pays, qui devaient nettoyer leurs vêtements directement à la rivière en utilisant de la roche plate tout aussi durable que la plus solide des Maytag. La chanteuse était allée là exercer son art en bikini, justement grimpée sur une de ces roches lissées par le temps, l’eau et le travail à bras de femmes… Ces dames lui servaient de décor champêtre. Je me demandais, en l’écoutant, quel lien pouvait-elle bien faire en sa tenue légère et le travail dur et acharné des dites lavandières… Peut-être voulait-elle, inconsciemment, justifier sa minceur de l’époque, et en faire un produit de dur labeur… Mystère.
J’arrive tout juste de Puerto Vallarta. J’ai eu du temps superbe. En voyant l’abondance des turquoises, des bleus, des blancs, des verts, je me suis pris à penser à Gauguin, fasciné par le soleil et les couleurs de Tahiti. Rien que ça ! Et je me suis beaucoup promené. Puerto Vallarta est maintenant une très jolie petite ville. Plusieurs artistes ont été embauchés pour embellir la ville. La petite église catholique coloniale a été couronnée en 2009, et l’œuvre est superbe. Sur l’avenue principale, un théâtre à la grecque a été aménagé ; j’y ai vu des spectacles en plein air hautement professionnels. J’y ai vu, surtout, une sculpture remarquable, d’une lavandière d’autrefois, placée tout juste entre la mer, et des condos d’un luxe extravagant, protégés par de hautes clôtures, des serrures électroniques et des gardiens armés… Qui a voulu se moquer de ces riches enfermés dans leurs tours d’ivoire tout blanc, se réservant la plage pour eux seuls, se protégeant d’on ne sait quel danger par des gardiens tout en muscle, armés jusqu’aux dents ? La lavandière est là, devant cet étalage de luxe, qui fait patiemment, perpétuellement son travail, sans colère, sans pointer du doigt ces riches étrangers qui lui volent petit à petit son pays…
Loin de m’inciter à la soumission, la lavandière m’a heurté, choqué, rappelé dramatiquement la délocalisation, l’exploitation de la main-d'œuvre si bon marché du Mexique, le cheap labor à la solde des nouveaux riches et de leurs vêtements souillés. Le Mexique nous habille et nous lave, de plus en plus.
Je suis sûr, sûr et certain que la municipalité de Puerto Vallarta n’a pas placé cette statue au hasard. Elle est précisément là où elle est, pour rappeler le fossé grandissant entre les riches et les pauvres. Elle est là comme une critique sociale voulue et délibérée. La lavandière pourrait s’immoler par le feu, comme ce jeune tunisien sans avenir et outrageusement méprisé par un ordre social parfaitement immoral, déclenchant la révolte que l’on sait, et dont on souhaite qu’elle devienne et reste une authentique révolution. Elle est là pour faire peur, pour donner la trouille aux confortables de toutes sortes qui ne vont au Mexique que pour s’en approprier une parcelle, rejetant le plus loin possible les indigènes qui pourraient se croire encore chez eux. J’imagine qu’il y en a pour trouver cette sculpture fâcheuse, d’un goût douteux, et pour tout dire, franchement, de trop. Elle finira peut-être par être déplacée.
Il y a, dans le vieux Puerto Vallarta, un commerce qui affiche à sa porte cette courte note : « Ici, les Mexicains sont aussi les bienvenus ». C’est tout dire du respect qu’on attend des touristes, et des envahisseurs fortunés qui s’installent en chassant les pauvres de leur connaissance et de leur vue.


  










dimanche 30 janvier 2011

ALIÉNATION TRANQUILLE


Milton Friedman: économiste, prix Nobel 1976, principal concepteur ( et de loin ! ) de la très actuelle, et très vantée théorie dite « néolibérale »



J'ai trouvé, ce matin, sur un blogue souvent fabuleux, [ http://bernard-o.blogspot.com/ ] le texte suivant: cynique, percutant, et surtout, responsabilisant, quant à nos valeurs dans le monde économique et social dans lequel nous vivons. Je ne sais pas qui est l'auteur premier de ce texte. Mais il n'en reste pas moins ma Chose vue ( et lue ) du jour. Voici. Amis lecteurs, délectez-vous :


« 1) J'accepte la compétition comme base de notre système, même si j'ai conscience que ce fonctionnement engendre frustration et colère pour l'immense majorité des perdants.

2) J'accepte d'être humilié ou exploité à condition qu'on me permette à mon tour d'humilier ou d'exploiter quelqu'un occupant une place inférieure dans la pyramide sociale.


3) J'accepte l'exclusion sociale des marginaux, des inadaptés et des faibles car je considère que la prise en charge de la société a ses limites.


4) J'accepte de rémunérer les banques pour qu'elles investissent mes salaires à leur convenance, et qu'elles ne me reversent aucun dividende de leurs gigantesques profits (qui serviront a dévaliser les pays pauvres, ce que j'accepte implicitement). J'accepte aussi qu'elle prélèvent une forte commission pour me prêter de l'argent qui n'est autre que celui des autres clients.


5) J'accepte que l'on congèle et que l'on jette des tonnes de nourriture pour ne pas que les cours s'écroulent, plutôt que de les offrir aux nécessiteux et permettre à quelques centaines de milliers de personnes de ne pas mourir de faim chaque année.


6) J'accepte qu'il soit interdit de mettre fin à ses jours rapidement, en revanche, je tolère qu'on le fasse lentement en ingérant ou en inhalant des substances toxiques autorisées par les États.


7) J'accepte que l'on fasse la guerre pour faire régner la paix. J'accepte qu'au nom de la paix, la première dépense des États soit le budget de la défense. J'accepte donc que des conflits soient créés artificiellement pour écouler les stocks d'armes et faire tourner l'économie mondiale.


8) J'accepte l'hégémonie du pétrole dans notre économie, bien qu'il s'agisse d'une énergie coûteuse et polluante, et je suis d'accord pour empêcher toute tentative de substitution s'il s'avérait que l'on découvre un moyen gratuit et illimité de produire de l'énergie, ce qui serait notre perte.


9) J'accepte que l'on condamne le meurtre de son prochain, sauf si les États décrètent qu'il s'agit d'un ennemi et nous encouragent à le tuer.


10) J'accepte que l'on divise l'opinion publique en créant des partis de droite et de gauche qui passeront leur temps à se combattre en me donnant l'impression de faire avancer le système. J'accepte d'ailleurs toutes sortes de divisions possibles, pourvu qu'elles me permettent de focaliser ma colère vers les ennemis désignés dont on agitera le portrait devant mes yeux.


11) J'accepte que le pouvoir de façonner l'opinion publique, jadis détenu par les religions, soit aujourd'hui aux mains d'affairistes non élus démocratiquement et totalement libres de contrôler les États, car je suis convaincu du bon usage qu'ils en feront.


12) J'accepte l'idée que le bonheur se résume au confort, à l'amour, au sexe, et la liberté d'assouvissement de tous les désirs, car c'est ce que la publicité me rabâche toute la journée. Plus je serai malheureux et plus je consommerai: je remplirai mon rôle en contribuant au bon fonctionnement de notre économie.


13) J'accepte que la valeur d'une personne se mesure à la taille de son compte bancaire, qu'on apprécie son utilité en fonction de sa productivité plutôt que de sa qualité, et qu'on l'exclue du système si elle n'est plus assez productive.


14) J'accepte que l'on paie grassement les joueurs de football [ de hockey ] ou des acteurs, et beaucoup moins les professeurs et les médecins chargés de l'éducation et de la santé des générations futures.


15) J'accepte que l'on mette au banc de la société les personnes agées dont l'expérience pourrait nous être utile, car étant la civilisation la plus évoluée de la planète (et sans doute de l'univers) nous savons que l'expérience ne se partage ni ne se transmet.


16) J'accepte que l'on me présente des nouvelles négatives et terrifiantes du monde tous les jours, pour que je puisse apprécier a quel point notre situation est normale et combien j'ai de la chance de vivre en Occident. Je sais qu'entretenir la peur dans nos esprits ne peut être que bénéfique pour nous.


17) J'accepte que les industriels, militaires et politiciens se réunissent régulièrement pour prendre sans nous concerter des décisions qui engagent l'avenir de la vie et de la planète.


18) J'accepte de consommer de la viande bovine traitée aux hormones sans qu'on me le signale explicitement. J'accepte que la culture des OGM se répande dans le monde entier, permettant ainsi aux trusts de l'agroalimentaire de breveter le vivant, d'engranger des dividendes conséquents et de tenir sous leur joug l'agriculture mondiale.


19) J'accepte que les banques internationales prêtent de l'argent aux pays souhaitant s'armer et se battre, et de choisir ainsi ceux qui feront la guerre et ceux qui ne la feront pas. Je suis conscient qu'il vaut mieux financer les deux bords afin d'être sûr de gagner de l'argent, et faire durer les conflits le plus longtemps possible afin de pouvoir totalement piller leurs ressources s'ils ne peuvent pas rembourser les emprunts.


20) J'accepte que les multinationales s'abstiennent d'appliquer les progrès sociaux de l'Occident dans les pays défavorisés. Considérant que c'est déjà une embellie de les faire travailler, je préfère qu'on utilise les lois en vigueur dans ces pays permettant de faire travailler des enfants dans des conditions inhumaines et précaires. Au nom des droits de l'homme et du citoyen, nous n'avons pas le droit de faire de l'ingérence.


21) J'accepte que les hommes politiques puissent être d'une honneteté douteuse et parfois même corrompus. Je pense d'ailleurs que c'est normal au vu des fortes pressions qu'ils subissent. Pour la majorité par contre, la tolérance zéro doit être de mise.


22) J'accepte que les laboratoires pharmaceutiques et les industriels de l'agroalimentaire vendent dans les pays défavorisés des produits périmés ou utilisent des substances cancérigènes interdites en Occident.


23) J'accepte que le reste de la planète, c'est-à-dire quatre milliards d'individus, puisse penser différemment à condition qu'il ne vienne pas exprimer ses croyances chez nous, et encore moins de tenter d'expliquer notre Histoire avec ses notions philosophiques primitives.


24) J'accepte l'idée qu'il n'existe que deux possibilités dans la nature, à savoir chasser ou être chassé. Et si nous sommes doués d'une conscience et d'un langage, ce n'est certainement pas pour échapper à cette dualité, mais pour justifier pourquoi nous agissons de la sorte.


25) J'accepte de considérer notre passé comme une suite ininterrompue de conflits, de conspirations politiques et de volontés hégémoniques, mais je sais qu'aujourd'hui tout ceci n'existe plus car nous sommes au summum de notre évolution, et que les seules règles régissant notre monde sont la recherche du bonheur et de la liberté de tous les peuples, comme nous l'entendons sans cesse dans nos discours politiques.


26) J'accepte sans discuter et je considère comme vérités toutes les théories proposées pour l'explication du mystère de nos origines. Et j'accepte que la nature ait pu mettre des millions d'années pour créer un être humain dont le seul passe-temps soit la destruction de sa propre espèce en quelques instants.


27) J'accepte la recherche du profit comme but suprême de l'Humanité, et l'accumulation des richesses comme l'accomplissement de la vie humaine.


28) J'accepte la destruction des forêts, la quasi-disparition des poissons de rivières et de nos océans. J'accepte l'augmentation de la pollution industrielle et la dispersion de poisons chimiques et d'éléments radioactifs dans la nature. J'accepte l'utilisation de toutes sortes d'additifs chimiques dans mon alimentation, car je suis convaincu que si on les y met, c'est qu'ils sont utiles et sans danger.


29) J'accepte la guerre économique sévissant sur la planète, même si je sens qu'elle nous mène vers une catastrophe sans précédent.


30) J'accepte cette situation, et j'admets que je ne peux rien faire pour la changer ou l'améliorer.


31) J'accepte d'être traité comme du bétail, car tout compte fait, je pense que je ne vaux pas mieux.


32) J'accepte de ne poser aucune question, de fermer les yeux sur tout ceci, et de ne formuler aucune véritable opposition car je suis bien trop occupé par ma vie et mes soucis. J'accepte même de défendre à la mort ce contrat si vous me le demandez.


33) J'accepte donc, en mon âme et conscience et définitivement, cette triste matrice que vous placez devant mes yeux pour m'empêcher de voir la réalité des choses. Je sais que vous agissez pour mon bien et pour celui de tous, et je vous en remercie. »


J'aurais beaucoup à commenter ! Je me bornerai, pour enforcir et élargir le débat possible autour du point 10, de rappeler ce que James Madison, dans les Federalist Papers, disait de la démocratie, dont il affirmait qu'on n'avait rien à en craindre: que c'était là une invention merveilleuse, parce que l'élection d'une majorité artificielle et temporaire allait détourner le regard public du vrai problème, de la vraie question sociale, pour toujours et à jamais, celle de l'inégale répartition des fortunes et de l'injustice fondamentale de l'homme qui nait pour être exploité et ne rien avoir. Quel bonheur que cet homme devienne ( par exemple ) un républicain ou un démocrate, et qu'il en oublie ainsi sa condition ! Madison a convaincu là-dessus nombre de ses contemporains. Et de la révolution américaine jusqu'à maintenant, la démocratie a pu progressivement s'installer, les puissants apprenant à ne plus considérer les masses laborieuses comme une classe dangereuse, mais plutôt comme des votants aliénés. Le bonheur !




lundi 17 janvier 2011

RÉALISME SOCIALISTE ( À LA MANIÈRE BRÉSILIENNE )



Arrangement photo à partir d'une belle toile de la brésilienne Tarsila do Amaral.

L'antique machine à faire des riches au moyen du travail de la multitude... ( Voltaire )