Jacques Parizeau, premier ministre, à l'Assemblée nationale du Québec
- Pendant plus de 20 ans, la société québécoise a fonctionné sur la base d’une gratuité scolaire qui, éventuellement, devait venir quand les frais de scolarité ne devaient plus représenter grand-chose, à cause de l’inflation. Que des jeunes d’aujourd’hui veuillent discuter de ça, eh bien, il y a toute une génération qui a pensé la même chose. Ils ne sont pas hors-norme, ils ne sont pas hors d’ordre. C’est ridicule de les envoyer paître [ à cause du... ] déficit zéro [qui] bousille tout. À partir du moment où vous fixez l’objectif zéro [en France, entendez l'austérité de droite, la rigueur de gauche,] pour une date butoir et que ça devient une religion, vous cessez de réfléchir. On coupe partout, on ne se pose pas de questions... [Et pourtant...] c’est certain que la contribution des entreprises doit être augmentée. [...] Par exemple, voulez-vous bien me dire pourquoi on a enlevé la taxe sur le capital au Québec ? Qu’est-ce que ça a donné ? [...] [P]our les banques, ça ne crée pas une job. Tout ce que ça fait, c’est transférer de l’argent des contribuables aux actionnaires.
Jacques Parizeau, ancien premier ministre du Québec, en entrevue au journal Le Devoir, le 12 février 2013.
J'aime M. Parizeau. Il a été le plus décolonisé, le plus libre de nos premiers ministres. Je me rappelle quand il a démissionné: des éditoriaux disaient de lui qu'il n’aura été, à tout prendre, qu’un petit, qu’un microscopique premier ministre. Et il s'en est trouvé, nombreux, pour faire la fine bouche, et même la grimace: quel raciste, quand même, que ce vieil alcoolique ! On marchait dessus, avec plaisir, comme on piétine un drapeau honni, et la conscience nette avec ça: « plus jamais de ma vie je n'allais voter Oui » à une souveraineté aussi vulgairement ethnique, disait encore tout récemment Line Beauchamps. Richard Desjardins lui-même, de France, et très suffisant, s'était permis en 1995 de sermonner Parizeau. Et voilà que M. Parizeau parle, et parle encore, et critique sévèrement la responsabilité des gens de la finance pour la crise de 2008, et la pauvreté dévastatrice qu'elle a créée. Et voilà que M. Parizeau soutient, sans rompre avec le Parti québécois, les convictions indépendantistes de M. Jean-Martin Aussant, « avant, pendant et après » les élections générales. Et voilà que M. Parizeau critique l'obsession du déficit Zéro de l’actuel gouvernement du Québec, et explique que la gratuité scolaire se financerait facilement par une taxation plus équitable sur les profits (scandaleux) des banques. Et là, c'est le concert, magique, à gauche, et chez tous les progressistes bien-pensants: quel homme, quand même, ce Parizeau, et on les lui passe bien, désormais, ses propos sur « l'argent et les votes ethniques », premiers responsables de la défaite référendaire de 1995, à l’opposé d’un « nous » francophone qui a voté Oui, pour l'indépendance nationale, à plus de 60%. J'aime M. Parizeau. Je n'ai jamais cessé de l'aimer beaucoup. Mais ça me fait rigoler (et ça me dégoûte un peu, très franchement) de lire, de voir et d’entendre celles et ceux qui l'ont démonisé, à jamais, et qui ont fait un tort irréparable à l'indépendantisme québécois en lepenisant M. Parizeau, son discours de défaite référendaire, et tout le mouvement indépendantiste avec lui, le monter aux nues, aujourd'hui, et le dire des « nôtres », parce que M. Parizeau soutient la Cause des gens qui se flattent de morale, et se prétendent les seuls justes et bons.
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