vendredi 10 mars 2017

GABRIEL NADEAU-DUBOIS POLITICIEN




On ne sait plus pourquoi. 

On ne sait plus pour quelle raison projeter la souveraineté du Québec. Faire l’indépendance est devenue, avec le temps, une proposition thaumaturge, qui garantit que celui (ou celle) qui en fait la promotion peut se dire docteur ès gauche, praticien qui peut tout guérir des maux sociaux avalisés par les autres, celles et ceux qui se partagent, avec une parfaite immoralité (dit-il, depuis 30 ans), l’assiette au beurre du petit pouvoir provincial. C’était manifeste dans la déclaration de candidature de Gabriel Nadeau-Dubois, ce jeudi 9 mars, engagement loin, archi loin de ce qui pouvait, par exemple, motiver MM Lévesque ou Parizeau. 

Être de gauche, nous a déclaré GND, « c’est s’opposer à la stigmatisation de la religion » ; être de gauche, « c’est être du côté des gens ordinaires, des mal pris, des oubliés. » Être indépendantiste, c’est « pour que le Québec puisse devenir un lieu où tout le monde vit bien »; c’est pour « revoir nos accords commerciaux et sortir du pétrole ». 

Je veux bien de tout ça — encore que je reste attaché à la laïcité de l’État, qui ne devrait stigmatiser rien ni personne, sauf l’obscurantisme et les idéaux déshumanisants, véritable opium du peuple.

Je veux bien de tout ça, mais pourquoi ce programme ambitieux, emballant, devrait-il nécessiter l’indépendance du Québec ? En quoi le RestOfCanada est-il à ce point borné qu’il lui soit impossible de partager les idéaux économiques et sociaux des progressistes québécois ? En quoi le système fédéral, dans sa structure même, et tout en considérant qu’il est l’État fort, empêche-t-il qu’on puisse s’assurer de la paix religieuse, se préoccuper des gens ordinaires et des mal pris, revoir nos (mauvais) accords commerciaux et désavouer notre économie trop polluante ?

On sent bien, à simplement poser ces questions, que le projet indépendantiste se situe ailleurs que dans ces objectifs que s’est fixés GND, aussi nobles soient-ils.

Pourquoi, alors, faire la souveraineté ? Là-dessus, sur cette problématique essentielle, cruciale, qui transcende la gauche contemporaine, je suis de ceux qui, comme Pierre Vadeboncoeur, parlent certes pour l’instant de « résistance », mais qui parlent aussi, avec l’indépendance, de pouvoirs à venir, « et c’est ici que l’histoire du Québec s’inverse complètement. » (1) C’est ce formidable retournement historique, c’est ce renversement, cette révolution, qui sont impensables sans l’indépendance. Et c’est précisément cette inversion de l’histoire du Québec qui, personnellement, me fonde à rester indépendantiste.

(1) Pierre Vadeboncoeur, La dernière heure et la première, 1970, p. 74.







5 commentaires:

Anne-Sophie a dit…

Te lire aura fait beaucoup de bien au grand découragement que je ressens face aux politiques menées sur le globe, plus particulièrement les bouffonneries des français. Merci, Richard.

Richard Patry a dit…

C'est vrai que si aux États-Unis, c'est assez déprimant, en France, en revanche, c'est plutôt réjouissant... ;-) Macron, président ?

Anne-Sophie a dit…

Je crois que ce serait un moindre mal. Mais une fois encore, il faudra avant tout voter contre un candidat et non pour, ce qui devient décourageant (même si l'idiotie de la chose semble commencer à faire du chemin). D'où mon grand intérêt pour "Décadence" d'Onfray ;)

Richard Patry a dit…

Voter «contre»...: chose bien connue au Québec aussi, et finement exploitée par les politiciens eux-mêmes, non ?

Anne-Sophie a dit…

Oui, c'est pour cette raison que l'idée de faire de la politique l'affaire de tous me paraît un projet intéressant à réfléchir et développer, même s'il y aura toujours des brebis galeuses pour céder au chant des sirènes dès qu'ils auront une once de pouvoir entre les mains.

Je ne sais pas si c'est LA solution, en tout cas c'est une proposition qui commence à faire du chemin. Un chemin qui sera long tant que nous devrons avant tout contrer l'extrême droite.