Source: Stop Homophobie
Ce qui se passe en France (et aux États-Unis), en lutte contre le mariage pour tous, a réveillé la haine, même ici, au Québec, et certainement ailleurs dans le monde. La droite française flirte avec les pires souvenirs historiques qui soient, et emprunte, sans gêne aucune, les méthodes et autres arguments habituellement associés à la gauche quand elle exprime sa colère: la protestation de masse, dans la rue, au nom du peuple exploité et trompé, du peuple qui rompt le silence résigné, s'échappe et gronde enfin, qui s'empare des moyens de défense ultimes qui lui restent, la violence urbaine, la confrontation avec les forces de l'ordre, le dénigrement de l'État, les appels à la démission, et bien sûr, la dénonciation des grands médias, décriés comme merdias, par collusion avec le pouvoir...
Ça ne nous rappelle pas, à nous Québécois, quelque chose de très récent, dites ?
Je veux bien que l'aliénation nourrisse la colère, même quand elle dérive à droite toute: on a assez dit, avec raison, que l'islamisme avait remplacé le marxisme. Hugo Chavez, que j'aimais tant, avait bien compris le phénomène, pour lui simple accident de l'Histoire, parenthèse philosophique sans conséquence sur la révolution à venir, inévitable. Il n'était pas le seul. Des collègues historiens ont eu cette analyse, ont tenu ce discours de connivence. Il y a pourtant à réfléchir, désormais, sur la parenté des façons de faire, entre gauche et droite. Ce n'est pas la première fois, dans l'histoire contemporaine, que cette équivalence délibérée devient manifeste, et fière de ce qu'elle fait. Et il y a certainement une responsabilité à y avoir, à gauche, quand on justifie si facilement l'action de la rue, l'agitation-propagande, et l'insubordination, parce que la méthode peut se retourner, terriblement, contre les idéaux les plus équitables, et les plus nobles. Ce qui se passe en France est un dérapage grave, qui pourrait tout aussi bien arriver aux États-Unis (où la droite se travestit en Tea Party, s’approprie du souvenir révolutionnaire, et autorise, du coup, l'expression possible d'une violence réactionnaire), ailleurs en Europe ou au Proche-Orient, ici même au Québec. En France, la droite ne résiste plus aux appels extrémistes. Et elle a le culot de parler du «printemps français». Le printemps français ! Contre François Hollande ! On croit rêver. Rien n'est jamais acquis à l'Homme, disait Aragon. Il semble, en effet.
La haine me fait peur. Il arrive, parfois, qu'elle s'enorgueillisse de s'exprimer «librement», d'autant plus que, même en 2013, peu de personnes se risquent à protester contre le rejet agressif des minorités sexuelles, de crainte d'être perçues comme sexuellement équivoques. Eh, t'es pas pédé, toi ? Tu serais pas un hostie de fif ?... Le droit à l'égalité face au mariage, c'est en fait le droit à l'égalité en soi, et le droit de se dire, également, pour tous. C'est ce que les opposants ont parfaitement saisi, d'où la haine, visqueuse, qui se répand. Qu'arrivera-t-il, quand la haine en prendra plus large encore, et que la droite, par dizaine de milliers, dans la rue, gonflée à bloc par ce qu'elle verra comme un combat héroïque, élargira son cercle d'ennemis ?
Rien n'est jamais acquis. Pas même l'égalité en droit. Pas même la démocratie. C'est à la gauche d'y voir, et de mesurer les effets, à terme, de sa logistique habituelle.
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