dimanche 20 octobre 2013

UNE PLACE POUR CHAQUE FEMME, ET CHAQUE FEMME À SA PLACE







Sidérant. 

Un concept publicitaire remarquable imaginé par Christopher Hunt, pour Femmes ONU/UN Women. 

Le designer a simplement interrogé le moteur de recherche Google, sur ce que les femmes devraient ou ne devraient pas faire, ou pire encore, sur ce dont elles auraient vraiment besoin - dans l'hypothèse où le genre masculin voudrait se pencher sur leurs urgences spécifiques et distinctives.

Ce n’est ni d’égalité juridique ou civile, ni de salaires justes et équitables, ni de libre disposition de leurs corps et de leur sexualité dont il est prioritairement question sur Internet. Non.

Les propositions du célèbre moteur de recherche (en fait, ici, les réponses à des suggestions de recherches volontairement initiées) vont toutes dans le sens des pires préjugés, des clichés les plus crasseux qu’on puisse imaginer. Qui pouvait supposer que ce qu’on désirait des femmes, à la grandeur du monde, du moins le monde qui interroge Google en anglais, était encore à ce point arriéré ? Ces listes de suggestions, faut-il le rappeler, sont générées à partir de questions similaires déjà fréquemment formulées, et des cooccurrences les plus courantes combinées au mot « femmes » par la « littérature » en ligne les concernant.

Le résultat est sidérant, percutant, révélateur: le constat, navrant. Cette pub devrait faire le tour du monde, devrait être vue par tous.

PS J’ai testé «men need to»: le résultat est parfaitement cohérent avec ce que l’on vient de constater... À «gay men need to», Google restait estomaqué, un peu scandalisé, et sans rien à suggérer... 








mercredi 16 octobre 2013

MARIE-ANTOINETTE, OU QUAND ON PERD LA TÊTE...


Croquis de David, 1793



Il y a 220 ans, aujourd’hui même, Marie-Antoinette, ci-devant reine de France, veuve Capet depuis l’exécution de Louis XVI, son époux, avec qui elle était mariée selon le rite catholique le plus strict, se dirigeait (un peu forcée) vers l’échafaud, pour apprécier à sa juste mesure l’efficacité du grand «rasoir national»... Le peintre Louis David s’était placé sur son chemin, et s’était rendu ensuite (en courant ?) Place de la Révolution (devenue depuis Place de la Concorde) pour voir, de ses yeux vus, la lame trancher le cou royal. (Comme tout mécréant, David était de ceux qui ne croyaient que ce qu’ils touchaient, ou presque...) D’où, les deux dessins qu’il a rapidement tracés, hyper célèbres, mais qui, selon certains, ne sont pas vraiment de beaux dessins...

La reine était devenue presque aveugle: elle n’y voyait plus rien, ce qui explique, peut-être, qu’elle écrasa le pied du bourreau, par inadvertance, et qu’elle s’en excusa, pleine de politesse et de sainte componction. Elle avait 38 ans. Elle en avait l’air du double, tant elle avait vieilli prématurément, mais on lui interdisait de porter quelque maquillage dissimulant ou crème qui masque... Elle n’avait plus le cheveu blond, mais blanc, et ne pouvait plus se faire coiffer à sa guise, chaque matin, comme toute femme libre de son corps pourrait le faire, une misère - bien que le matin de son exécution, on lui ait fait une petite coupe rafraichissante, que sa servante, tant bien que mal, avait cachée d’un simple bonnet sans ostentation... Les dessins de David sont là-dessus sans pitié. Ce sont les seules «photographies» de l’événement dont nous disposons. On peut leur supposer la bonne foi...

Durant son procès, la reine avait été odieusement calomniée, citée hors contexte, traînée dans la fange et dans la boue, accusée (sans preuve aucune) de félonie péquiste, toutes choses qui, de nos jours, seraient absolument impensables - particulièrement de journalistes intègres et chevronnés, s’exprimant sur les réseaux sociaux (le peuple hurlant et braillant des insultes, c’était, en ces temps de barbarie vulgaire, évidemment autre chose...) On avait privé la reine, dans son cachot sombre et froid, de tout signe religieux ostentatoire: l’époque était à l’incroyance militante, et l’esprit fort que je suis (athée, en plus) est embarrassé d’avoir à révéler pareille confiscation ignominieuse, avec ce qui n’était, après tout, que manière de bouts de tissus insignifiants, de morceaux de bois, rien de bien dangereux, qui auraient pu consoler le coeur de la malheureuse... Le fait est que la reine, rendue à sa dernière heure, refusa net de se confesser, malgré le prêtre qui la suppliait de le faire, encore dans la charrette brinquebalante qui la menait à sa triste fin: « allons, madame, lui disait-il, le siècle qui vient sera religieux ou ne sera pas, les croyants espèrent de vous, faites le pari de Dieu, sauvons la France et le monde du péril de la laïcité civique. » La reine, privée trop longtemps de signes ostentatoires, en avait perdu la tête, avant même que de la perdre plus concrètement encore, tout au fond d’un panier outrageusement laïque et républicain...

Marie-Antoinette a été sacrifiée. Elle eut, sur le fait, un petit sourire de béatitude, le dessin de David témoigne clairement de la chose. Jamais preuve de la réalité du Paradis n’a été aussi éclatante, du moins c’est ce que prétendent, encore de nos jours, les zélotes du Sabre et de la Croix, des Soucoupes volantes et des Textiles en tout genre... La reine n’est jamais «revenue», pas d’apparition ni rien, et n’a pu témoigner du Ciel, comme certains d’entre nous pourraient, encore de nos jours, l’espérer contre toute science et tout bon sens. Restent Lourdes et Sainte-Anne, dans l’attente...

Paix à la reine. Il y a 220 ans.


PS Si ce récit offre quelque ressemblance avec ce qui se passe au Québec, ce ne serait là que le fruit d’un hasard inspiré. N’y voyez (probablement) rien d’autre que la main de Dieu.






lundi 14 octobre 2013

« IF YOU TELL ANYONE, I'LL KILL YOU »


Source de l'image, et de tout l'article, qui m'ont inspiré ce billet de blogue:





Ils sont bouleversants. Quand on parle d’eux, quand on évoque la dévastation qui leur est arrivée, pas seulement du fait d’hommes, mais aussi de femmes, qui utilisent exactement le même genre d’arguments que tous les agresseurs d’enfants, les bien-pensants, les esprits tranquilles, de quelques bords qu’il soient, baissent les yeux, souhaitent que ces hommes se taisent, font en sorte de ne plus les entendre, ne les fêtent jamais.

Les hommes victimes d’agression sexuelle durant leur enfance dérangent d’abord par le caractère sordide de ce qui leur est arrivé — les sévices sexuels, le viol, l’anéantissement de ce qu’ils auraient pu faire de leur vie, librement, si seulement leur destin n’avait pas été si violemment réorienté vers le tréfonds de la honte, emprisonné dans un corps ressenti comme sale et dégoûtant, devenu leur ennemi, le seul ennemi qu’ils se connaissent. L’identité sexuelle de ces hommes est à tout jamais faussée, confuse, troublée. « Est-ce que je suis un garçon ou une fille ? Pourquoi c’est à moi que c’est arrivé ? Pourquoi je ne me suis pas défendu ? J’ai imaginé tout ce que je raconte ?  Ça ne peut pas être vrai, ce n’est même pas vrai. C’est clair et net que je suis fou. J’aime mieux mourir. » Ce message, livré à soi-même, complexe, terrible, il a été, d’abord et très souvent, proféré par un autre, comme une menace, valable à vie: « If you tell anyone, I’ll kill you ».

Quand ces hommes parlent, ils sont vite rejetés, isolés. Les hommes victimes d’abus sexuels dérangent l’ordre sexuel, et l’ordre des agressions sexuelles. On a beau les dénombrer en « cas » de plus en plus récurrents, à mesure que l’on sait, et calculer leur nombre par centaines, par milliers, victimes de pères, de mères, de grands frères, de bonnes dames généreuses d’elles-mêmes (quelle chance ils ont eue, quand même !), de prêtres pédophiles, d’hommes et de femmes responsables de jeux d’enfants en tous genres; des études ont beau démontrer qu’ils sont probablement aussi nombreux que les petites filles à être agressés, et que les agresseurs ne sont pas systématiquement que des hommes, rien n’y fait. Ils disposent d’un très, très court temps de parole, toujours trop long pour qui n’a pas envie ni d’entendre, ni de savoir. Quand les hommes abusés sexuellement dans leur enfance parlent, ils abusent de leur entourage, ils violent la tranquillité d’esprit de leur famille, de leurs amis, de leurs collègues de travail, et on le leur fait vite comprendre. « Oublie ça. Passe à autre chose. Il faut vivre. »

Leur malheur d’adultes, quand ces hommes cherchent à se confier, à se réparer, vient du fait qu’ils ne peuvent pas s’intégrer dans la structure classique, dite « patriarcale », de l’agresseur et de l’agressée; alors, bien sûr, leur existence collective, même massive, et haute comme une cathédrale, brouille les cartes, torpille les « enjeux », emmerde les esprits conformistes, surtout celles et ceux qui disposent, une fois pour toutes, de vérités sociologiques révélées; ils violent une règle fondamentale, mille fois écrite, qui dit que les vrais rapports de pouvoir sexuels, les seuls qui comptent, sont le fait d’hommes contre les femmes, et que ces rapports de force illustrent, prolongent l’exploitation économique globale, preuve indéniable de leur seule vérité. À ces répressifs de la rectitude idéologique, souvent de gauche, s’ajoute le mépris de celles et de ceux qui égrènent leur élévation spirituelle d’une main, mais qui étalent leur médiocrité de boutiquier de l’autre, la droite, l’égoïste, celle qui ne veut jamais ni rendre, ni donner. Ces gens sont la preuve même — on s’entend — de l’« existence de Dieu ».

Toute cette longue dissertation, perte probable de temps, n’est que pour dire ce que ces 26 hommes m’ont inspiré;  ces 26 photos d’hommes qui racontent, en les citant, l’essentiel de ce que leur ont asséné leurs agresseurs, hommes ou femmes, pour les étouffer, et les « tuer », à vie, après les avoir abusés. Ils valent la peine qu’on les regarde, qu’on les lise avec attention. Il faut les écouter. Ce sont gens de paroles.








jeudi 10 octobre 2013

LE DROIT À LA RELIGION: «L’ÂME D’UN MONDE SANS COEUR» (Marx)


Soleil inca. Musée de la Nation, Lima (Pérou)



Étonnante, cette fascination pour la représentation symbolique de l’Autorité contraignante, autrefois parée de lourds signes religieux ostentatoires, mais qui deviendrait reconnaissable, désormais, du simple fait qu’elle, et elle seule, se verrait interdite de s’en affubler... 

Il y a, dans les deux cas, le profil d’un totalitarisme inquiétant: une sorte de fascination morbide pour la Contrainte, parée d’un mystère impénétrable, naguère celui d’un Dieu tout-puissant, désormais celui d’une Coercition «neutre», et d’autant plus terrifiante qu’elle se situe au-dessus de toutes les divinités, et plus transcendante parce que plus abstraite encore que chacune d’entre elles.

Cette sobriété ciblée, c’est puissamment religieux; c’est Jésus, fabuleusement séduisant parce qu’il n’est en rien, jamais, ostentatoire, pas même quand il se montre presque nu, lui, un fils de dieu, horriblement crucifié. Mais c’est lui, pourtant, qu’on adore, dont on couvre d’or la «maison», et pour lequel, prodige ultime, on se ferait tuer avec joie - avec folie. L’Église savait bien ce qu’elle faisait quand elle fit de sa Croix le plus puissant des symboles, l’essence même d’un surmoi religieux écrasant. C’est que ça fonctionne; c’est que ça «rend».

Aux Grands, donc, ceux qui mangent et qui boivent, ceux qui peuvent soumettre et contraindre, la sobriété temporelle, la sagesse du dépouillement, et pas même la Crucifix, dont on pense maintenant qu’il désertera le Salon bleu de l’Assemblée nationale. Aux autres, à tous les autres, les signes religieux ostentatoires en abondance, et surtout à ces «petits» (ce bon peuple de travailleurs, soumis à l’exploitation et au pouvoir parfaitement irréligieux de l’Argent, encadré par des fonctionnaires publics qui doivent partager avec la multitude ses croyances vulgaires pour mieux lui en faire accroire et la contrôler), à cette masse anonyme, donc, les attributs religieux ostentatoires, dont on espère qu’ils seront encore et toujours, pour cette foule de profanes serviles, comme un opium consolant sous tous rapports. On s’en amuse, bien sûr, dans les milieux éclairés, qui sont depuis toujours bien au fait de la vanité de ces symboles et de l’usage concret qu’on en fait pour aliéner et soumettre le plus grand nombre (en pourcentage: 99 % !) de la population. 

Parce qu’il faut bien comprendre que la laïcité limitée qu’aux pouvoirs de contrainte, c’est une manoeuvre essentiellement religieuse, c’est le parachèvement du culte solaire dépouillé de tous les ornements animistes qu’il a traînés longtemps avec lui. Louis XIV, s’il était encore vivant, le comprendrait parfaitement, et la jouerait modeste, avec son ostentation quotidienne désormais sans dentelle, dans un palais tout ce qu’il y aurait de plus «neutre», au service du nouvel État-Dieu - mais sans providence. Et il aurait compris, parfaitement compris, pourquoi le pouvoir Inca se réservait pour lui seul l’austérité grandiose du culte solaire, alors que les peuples soumis de l’empire avaient la liberté (contrainte) de croire à tout, de se parer de tout, y compris des symboles de ce misérable culte lunaire, cette «lune» incapable d’apprendre à compter correctement, ni le temps ni l’or, une farce sinistre destinée qu’à la seule stratification sociale et à sa pérennité.

Et dire, dire que cette laïcité des seuls pouvoirs de «contrainte», c’est Bouchard-Taylor qui la proposent; dire que Monsieur Parizeau leur emboîte le pas, donne son accord, prestigieux; et dire que Madame Françoise David fait sienne cette nouvelle religiosité, cette moderne aliénation du petit peuple à qui on dit que sa religion, toutes ses religions en fait, c’est un droit absolu, de toute éternité. C'est là berner la foule immense des «contraints», dont on se moque bien de la crédulité (même en prétendant le contraire.) C’est fondamentalement incroyable qu'on en soit là. C’est à en être désillusionné, dépité.










vendredi 4 octobre 2013

LES AVEUGLES GUIDENT LES AVEUGLES


Bruegel l'Ancien. La parabole des Aveugles. 1568.



Quand l’Univers sera vieux, dans 50 milliards d’années, la distance séparant les amas, les nébuleuses, les galaxies et les objets sera si grande que le noir séparant les points lumineux effacera toute lumière. Les étoiles seront aveugles les unes aux autres parce que le noir aura tout noirci. Nous serons bien avancés. L’expansion de l’Univers connu est l’annonce d’une immense solitude, d’un isolement glacial dans le milieu de rien. Or, voilà la finalité du monde : l’érosion, l’épuisement, l’aplatissement. Car il est clair que l’Univers manufacture du rien à la vitesse de la lumière, il fabrique du vide à la mesure d’une énergie qu’il disperse à l’infini. Nous sommes un mince filet entre deux néants : le temps passé qui s’accumule, et le futur qui est si creux que nous ne parviendrons jamais à le meubler... Le néant est si plat que la lumière y meurt d’ennui. 


- Serge Bouchard, C’était au temps des mammouths laineux.






mercredi 2 octobre 2013

LA MENACE FAITE AUX FEMMES





Le Regroupement des centres de femmes du Québec n’est pas précisément un allié du Parti québécois. En fait, il tire à boulets rouges, au nom des «femmes», bien sûr, sur le gouvernement actuel, depuis l’automne 2012. Déjà sa colère était incandescente, au moment du premier budget Marceau, une «trahison», rien de moins, contre la classe moyenne et contre «les femmes». Il porte à gauche, le Regroupement: l’image est mauvaise, quand il s’agit d’une association féministe, mais pourtant très juste, et il suffit de prendre quelques petites minutes à peine, à visiter la page Facebook de l’association, pour savoir où se loge, politiquement, ledit Regroupement, et qui sont ses alliés. Jusque là, rien de mal, et c’est même plutôt sympa.

Mais voilà que le RCFQ lance dans le débat public, aujourd’hui 2 octobre, une véritable bombe incendiaire, qu’il profère une accusation très grave, ciblée,  quelque chose qui rappelle d’effroyables cauchemars vécus ailleurs, aux États-Unis il n’y a pas si longtemps, ou dans l’Europe des années 30 et 40, une allégation qui, comme souvent, fait s’imaginer le pire des Québécois francophones. La coupable, c’est cette Charte de la laïcité, dite des «valeurs», encore. « On a des échos de ça dans plusieurs régions du Québec. On parle de plusieurs dizaines d'incidents. Des propos haineux, racistes. Des commentaires xénophobes. Parfois les femmes se font bousculer, cracher au visage. Donc, on parle parfois d'incidents de nature violente»... « Depuis le début des débats entourant le projet de Charte, la sécurité des femmes est compromise »: attention, ici, lisons bien, et mesurons la portée des mots: la sécurité des femmes, de toutes les femmes, est compromise. Angèle Laroche insiste, en remet: « Que les discussions se poursuivent, mais qu'elles ne mettent pas en péril la sécurité des femmes.» (Source: Katia Gagnon, Tommy Chouinard, Femmes voilées: «augmentation dramatique» des agressions, La Presse.)

Il fallait s’attendre, dès l’amorce du débat sur la Charte de la laïcité, à ce qu’on dénonce de pareils incidents, puisque les opposants les avaient prédits, peut-être même stratégiquement souhaités. N’empêche, seraient-ils vrais, fondés, qu’ils seraient extrêmement inquiétants. On les suppose donc attestés. On présume donc que chaque cas, sans exception aucune, a fait l’objet d’une plainte à la police, et que nous disposons, comme société, de statistiques certaines, avérées, bel et bien identifiées,   chiffres qu’on peut comparer, avant, après, le dépôt du projet de charte. Ces statistiques, il faut de toute urgence les rendre publiques, parce que l’idée même de vivre dans un pays où l’État se rendrait complice, de par ses politiques, de pareils crimes, est parfaitement intolérable. Il faut que les chiffres parlent. Et de ce qu’ils apprennent, il faut que l’État prenne bonne note, réagisse, poursuive devant les tribunaux les immondes criminels, fasse plus encore que les déclarations apaisantes du ministre Drainville, faites à Québec, ce matin.

Mais. Mais. Mais.

Mais je ne peux m’empêcher de penser au débat sans fin concernant la Charte de la langue française, et aux présomptions, constantes, que cette loi aurait éveillé chez les Québécois de souche une haine primaire des Anglais, et de l’anglais. Contre cette charte de la langue, on a aussi parlé du pire: de discrimination, d’atteinte au droit international, d’ethnocentrisme, d’épuration raciale, d’invite à la haine publique. Et voilà qu’on suppose une récidive, cette fois contre des croyances visibles; c’est préoccupant, c’est sérieux.

Est-ce que c’était vrai, hier ? Et maintenant, est-ce vrai ? Les Québécois francophones sont-ils à ce point corrompus qu’ils respirent la haine et sentent la putréfaction ?

Si le débat pouvait cesser d’être politisé à l’extrême, manipulé, délirant, aussi bien dire essentiellement religieux, pour n’être que ce qu’il devrait être, politique, philosophique, et essentiellement civique, on en vaudrait tous mieux - et détail non négligeable, on assurerait au mieux la sécurité des personnes.

Dans l’immédiat, il faut des preuves de cette propagation d’islamophobie. Si elles s’avèrent, il faut poursuivre ces dangereux imbéciles en justice.  Les crimes racistes sont des actes extrêmement graves, que la société québécoise, qui se propose, comme pour la langue française, de faire de la laïcité une règle citoyenne commune, ne peut en aucun cas tolérer.







CONVALESCENCE




Il y a de ces journées d’automne où un aller-retour, d’un pas rapide, au parc Lafontaine, tout à côté de chez soi, même éblouissant, parce qu’il fait un temps superbe, ne change rien à l’humeur noire, ni à l’aigreur des écœurements que tu rabâches contre toi-même (et que tu digères mal...) T’es malade, en tout cas tu te sens malade. T’as juste envie de te coucher, de lire ce qui te passionnerait. Alors, tu rentres, et tu lis, couché bien sûr, tu te soignes, t’es malade. 

Je n’ai pas manqué de photographier les couleurs très vives de l’étang, et des arbres, déjà rougissants, du parc: je les ai vues, d’un coup, j’étais avec Marc. Mais ma vraie chose vue du jour, c’est cette aquarelle (ou cette gouache ?), belle métaphore du bien que fait la lecture. Je ne sais pas qui est l’artiste qui a conçu ce dessin à la fois si doux et si exact. C’est la Revue le libraire qui l’a publié, sur sa page Facebook, avec ce commentaire: «Prescription du médecin: une infusion par jour.» J’ai suivi l’ordonnance. Rien de mieux que d’être ailleurs, dans sa chambre, tout seul, quand tout te fait mal.