Cette photo de Paul Hansen, montrant une toute jeune fille, sauvagement tuée par la police haïtienne, en janvier 2010, a été primée en Suède. Depuis, une autre photographie a été publiée, montrant, elle, les circonstances exactes où la photo a été prise.
Ces deux photos ont déclenché une vive polémique sur le travail des journalistes, en particulier des photographes de presse. Jusqu'où peuvent-ils aller? Quelle morale peut, doit même encadrer leur travail? Tout est-il permis, quand il s'agit de faire un bon cliché? Et si le cliché est bon, sert-il la vérité ?
Ces deux photos témoignent indépendamment l'une de l'autre. Les deux servent un récit, racontent l'Histoire, et peuvent rester, à ce titre, des références. Je ne crois ni qu'elles s'opposent, ni qu'une condamne l'autre à l'usurpation de vérité, à fabrication de faux.
Même que la plus vraie, je crois, n'est pas celle qui révèle, crûment, les trucs du métier. La plus authentique est celle qui reconstruit l'événement, et qui l'expose avec force, avec soin, avec beauté. Paul Hansen a mérité son prix. La photo de Fabienne, 17 ans, tragiquement morte dans un pays où la loi n'est souvent qu'un concept hésitant, et où les impératifs de la survie particularisent les formes actuelles de la servitude, est aussi vraie, par exemple, que l'Oeuvre au noir, de Marguerite Yourcenar. La fiction, parfois, dit davantage que mille mots, mille documents, mille preuves, qui demandent tout autant que la photo de Paul Hansen, à être reconstitués pour offrir un sens réel et compréhensible au fait. Mais Yourcenar, et Hansen y ajoutent le talent qui recrée l'événement, et c'est là l'essentiel.
Source des photos: http://www.telerama.fr/monde/haiti-l-autre-image-qui-derange,67837.php
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